Saura-t-on jamais le fin mot de l’affaire qui a conduit à la mort de Michel Germaneau ?
Entre un gouvenement, qui ne peut que se réjouir de voir l’attention nationale enfin détournée des affaires Bettencourt/Woerth, toutes deux fâcheuses dans des genres différents et qui finissent, curieusement, par se mordre la queue, et des preneurs d’otages, plus ou moins ben ladenistes, à qui cette intervention armée fournit la « une » des médias et surtout une sortie de cet enlèvement plus honorable que l’aveu piteux de la mort de maladie de leur otage, qui devons-nous croire et y a-t-il même quelque chose à croire ?
Je voyais à midi, sur France2 me semble-t-il, une carte établie par les « journalistes » spécialisés de la chaîne ; on nous y montrait, par une flèche rouge mobile du plus bel effet, le parcours du commando qui, partant de Mauritanie, s’enfonçait jusqu’au coeur du Mali à la poursuite des supposés ravisseurs !
Why not ? Il y a toutefois matière à réflexion, car non seulement les relations mauritano-maliennes ne sont pas des meilleures, mais, en outre, la zone nord du Mali en cause ici, dont le peuplement est tamasheq (ou touareg si vous voulez), entretient avec le pouvoir central de Bamako des rapports pour le moins tumultueux.
On voit donc mal comment une telle opération, diplomatiquement d’une complexité qui la rend quasi impossible et logistiquement presque irréalisable, a pu être montée et même conçue. A beau mentir qui vient de loin :
Ce monsieur Germaneau est, lui aussi, un personnage assez singulier dans son genre. Ingénieur en retraite et célibataire, il est apparemment sans famille car on a interrogé ses voisins mais nul membre de ses proches ; il oeuvrait, dit-on, dans une ONG qui se consacre à l’éducation des enfants africains. Son but précis est, en la circonstance, de construire une école en pays tamasheq, ce qui est fort louable mais aussi singulier, compliqué et irréaliste à la fois.
En effet, les Tamasheq sont, vous l’avez déjà deviné, des nomades (« les gens du voyage » du Mali) ; l’implantation de structures administratives fixes à leur usage pose donc bien des problèmes à l’Etat malien.
Il en est ainsi, par exemple, pour les dispensaires et les centres de protection maternelle et infantile ; Bamako ne peut guère y envoyer, vu l’éloignement, que des soignants hommes. Naturellement tous parlent le bambara, que ne connaissent pas les Tamasheq, et les femmes encore moins que les hommes alors qu’elles constituent, en général, l’essentiel de la clientèle de tels centres. Si l’on ajoute que, dans la culture tamasheq, les femmes ne peuvent être soignées par des hommes, on voit toute la complexité de la situation. La fréquentation d’un dispensaire est en outre infiniment moins suivie par ceux et celles qui y viennent que celle d’une école, ce qui pose évidemment problème à des familles nomades.
Monsieur Germaneau, comme les experts de la Banque Mondiale et qui, comme eux, ne connaît rien à la langue et à la culture locales, ignore ou néglige sans doute ce genre de détail. Toutefois,comme un certain nombre d’« humanitaires », peut-être au fond ne cherchait-il pas aussi et peut-être même d’abord surtout dans de telles actions, si louables qu’elles soient, une solution à ses propres problèmes ! Au moins n’aura-t-il pas raté sa mort !
Entre un gouvenement, qui ne peut que se réjouir de voir l’attention nationale enfin détournée des affaires Bettencourt/Woerth, toutes deux fâcheuses dans des genres différents et qui finissent, curieusement, par se mordre la queue, et des preneurs d’otages, plus ou moins ben ladenistes, à qui cette intervention armée fournit la « une » des médias et surtout une sortie de cet enlèvement plus honorable que l’aveu piteux de la mort de maladie de leur otage, qui devons-nous croire et y a-t-il même quelque chose à croire ?
Je voyais à midi, sur France2 me semble-t-il, une carte établie par les « journalistes » spécialisés de la chaîne ; on nous y montrait, par une flèche rouge mobile du plus bel effet, le parcours du commando qui, partant de Mauritanie, s’enfonçait jusqu’au coeur du Mali à la poursuite des supposés ravisseurs !
Why not ? Il y a toutefois matière à réflexion, car non seulement les relations mauritano-maliennes ne sont pas des meilleures, mais, en outre, la zone nord du Mali en cause ici, dont le peuplement est tamasheq (ou touareg si vous voulez), entretient avec le pouvoir central de Bamako des rapports pour le moins tumultueux.
On voit donc mal comment une telle opération, diplomatiquement d’une complexité qui la rend quasi impossible et logistiquement presque irréalisable, a pu être montée et même conçue. A beau mentir qui vient de loin :
Ce monsieur Germaneau est, lui aussi, un personnage assez singulier dans son genre. Ingénieur en retraite et célibataire, il est apparemment sans famille car on a interrogé ses voisins mais nul membre de ses proches ; il oeuvrait, dit-on, dans une ONG qui se consacre à l’éducation des enfants africains. Son but précis est, en la circonstance, de construire une école en pays tamasheq, ce qui est fort louable mais aussi singulier, compliqué et irréaliste à la fois.
En effet, les Tamasheq sont, vous l’avez déjà deviné, des nomades (« les gens du voyage » du Mali) ; l’implantation de structures administratives fixes à leur usage pose donc bien des problèmes à l’Etat malien.
Il en est ainsi, par exemple, pour les dispensaires et les centres de protection maternelle et infantile ; Bamako ne peut guère y envoyer, vu l’éloignement, que des soignants hommes. Naturellement tous parlent le bambara, que ne connaissent pas les Tamasheq, et les femmes encore moins que les hommes alors qu’elles constituent, en général, l’essentiel de la clientèle de tels centres. Si l’on ajoute que, dans la culture tamasheq, les femmes ne peuvent être soignées par des hommes, on voit toute la complexité de la situation. La fréquentation d’un dispensaire est en outre infiniment moins suivie par ceux et celles qui y viennent que celle d’une école, ce qui pose évidemment problème à des familles nomades.
Monsieur Germaneau, comme les experts de la Banque Mondiale et qui, comme eux, ne connaît rien à la langue et à la culture locales, ignore ou néglige sans doute ce genre de détail. Toutefois,comme un certain nombre d’« humanitaires », peut-être au fond ne cherchait-il pas aussi et peut-être même d’abord surtout dans de telles actions, si louables qu’elles soient, une solution à ses propres problèmes ! Au moins n’aura-t-il pas raté sa mort !
Nouvelles Persaneries, 26/7/2010
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