L’hospitalité marocaine pour les personnages problématiques ne saurait être démentie. Qui ne se souvient pas aujourd’hui encore, comme si c’était hier, de tous les soins dont le roi Hassan II couvrait Simon Pérès ou les passants en quête de gîte comme le Shah d’Iran et le sanguinaire Mobutu Sese Seko?
Cette belle tradition est encore perpétuée par son fils Mohamed VI qui, après avoir soigné Omar Bongo et son épouse, a entouré une criminelle sujette à un mandat d’arrêt à Londres, Tzipi Livni de tous les honneurs, et a accueilli à bras ouverts le nouveau génocidaire de Conakry pour le soigner dans un douillet cadre hospitalier militaire à Rabat, après le massacre commis par sa soldatesque au stade.
En échange d’un soutien inconditionnel dans le dossier du Sahara Occidental, le roi marocain avait ouvertement pris position pour le chef de la junte au lendemain de sa prise de pouvoir, et avait même proposé au Capitaine de lui bâtir un palais avant de l’accueillir « pour des raisons humanitaires. » Camara a même affirmé que c’est le roi Mohamed VI et Kadhafi qui lui donnaient de l’argent.
Aujourd’hui, devant les pressions internationales, notamment de la France et des Etats-Unis, le Maroc a jugé nécessaire de se débarrasser du bourreau guinéen hanté par le TPI. Ne voulant pas sacrifier ses relations diplomatiques privilégiées avec l’Occident qui demandait la tête de Dadis, le Maroc a joué à la carte du renvoi de l’ascenseur et a réussi à se débarrasser de son encombrant invité, en passant la patate chaude à Ouagadougou.
Expulsé du Maroc, l’Espagne et la Centrafrique n’ayant pas voulu de lui malgré les demandes françaises, Dadis a atterri à Ouagadougou sans tapis rouge ni honneurs présidentiels pour, officiellement, « poursuivre sa convalescence ». Pourtant, le retour à Conakry, quelques jours plus tôt, du commandant Moussa Tiegboro Camara, ministre en charge de la lutte contre les narcotrafiquants et le grand banditisme, également soigné à Rabat à la suite d’un attentat à la grenade, annonçait celui du président guinéen.
Arrivé à 22h25 à bord d’un petit avion marocain de la compagnie King Air, Moussa Dadis Camara était accompagné d’un garde du corps, d’un médecin guinéen et de médecins marocains. Quelques minutes après seulement, il est sorti du salon et a aussitôt engagé une discussion avec les Marocains qui l’ont amené. Une discussion assez chaude puisque le capitaine Camara était surpris de se retrouver à Ouagadougou et demandait à partir immédiatement sur Conakry, là où il croyait se rendre lorsqu’il a embarqué à Rabat.
Les autorités bourkinabés ont choisi la discrétion jusqu’au dernier moment sur la nouvelle de la venue au Burkina du président guinéen et tenir la presse éloignée de la scène, en attendant de mettre au point les conditions de son installation.
Côté Maroc, c’est le silence radio. C’est l’habitude du Makhzen chaque fois qu’il commet une nouvelle bourde. Hier, c’était l’affaire Aminatou Haidar. Aujourd’hui, c’est le pari Dadis Camara qui est perdu, un pari gagné par l’opposition guinéenne.
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