Le cas du Sahara occidental reflète à merveille l’inquiétante agonie du droit international face à la realpolitik, ou comment les Etats – tout au moins ceux qui en ont la capacité – font passer leurs intérêts (principalement économiques) largement au-dessus du respect du droit international ou même généralement des principes élémentaires de justice.
Le combat et la perséverance du peuple sahraoui sont récompensés. Voilà une nouvelle qui sèmera la zizanie au sein de l’équipe de prédateurs de Rabat. Le bureau juridique du Parlement Européen vient de se prononcer sur l’accord de pêche signé par l’UE avec le Maroc. Il plaide pour réviser l’accord parce que « il n’y a aucune preuve que l’exploitation des ressources halieutiques profite la population sahraouie.
S’il n’y pas moyen de modifier cet accord, dont la fin sera au mois de juin prochain, l’UE doit « prévoir de le suspendre ou l’appliquer de façon que ses bateaux soient exclus des eaux du Sahara Occidental ».
Le rapport des services juridiques n’est pas contraignant, mais son contenu sera l’objet, jeudi, d’un débat animé au sein de la Commission de pêches du Parlement Européen. Sollicité en 2008, à la demande des Verts, par le Comité de Développement du Parlement Européen, le document a été rendu au mois de Juillet dernier à celui qui était, à l’époque, son président, Josep Borrell.
Après avoir analysé, en onze pages, l’accord de pêche avec le Maroc, le bureau juridique conclut qu' »il n’a pas été prouvé que (…) l’exploitation des ressources halieutiques du Sahara occidental bénéficie la population sahraouie. » En conséquence, il recommande que la prochaine réunion commune avec le Maroc est à la recherche « un accord à l’amiable qui respecte les droits des Sahraouis recueillis par le droit international ».
Les accords de pêche conclus entre le Maroc et l’Union européenne (UE) bradaient les richesses halieutiques sahraouies en toute illégalité.
L’ancien Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques, Hans Corell, tout en ne considérant pas ces contrats illégaux dans la mesure où ils ne visent que la reconnaissance, a rappelé qu’une extension de ces contrats à l’exploitation des ressources serait illégale dans la mesure où ils ne respecteraient pas les principes mentionnés ci-dessous. Il rappelle également que « Accord de Madrid ne prévoyait pas de transfert de souveraineté sur le territoire ni ne conférait à aucun des signataires le statut de puissance administrante » et que « le transfert des pouvoirs administratifs au Maroc et à la Mauritanie en 1975 n’a pas eu d’incidence sur le statut du Sahara occidental en tant que territoire non autonome ».
L’exploitation des ressources d’un territoire dont le peuple est empêché d’exercer son droit à l’autodétermination est strictement interdite(1). La résolution de l’Assemblée générale de 1991 réaffirme que : « toute puissance administrante ou occupante qui prive les peuples coloniaux de l’exercice de leurs droits légitimes sur leurs ressources naturelles ou subordonne les droits et intérêts de ces peuples à des intérêts économiques et financiers étrangers viole les obligations solennelles qui lui incombent en vertu de la Charte des Nations Unies »
(1) Voir KARMOUS Afifa, « Les ressources naturelles d’un territoire non autonome : le Sahara Occidental« , in Colloque des juristes sur le Sahara occidental, L’Harmattan, Paris, 2001. Texte disponible sur le site Internet de l’ARSO, à l’adresse suivante : <http://www.arso.org/colljupa.karmous.htm>
– Résolution 46/64 du 11 décembre 1991 sur les activités des intérêts étrangers, économiques et autres, qui font obstacle à l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux dans les territoires se trouvant sous domination coloniale, et aux efforts tendant à éliminer le colonialisme (…).
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