La droite dure européenne au secours dIsraël

De nombreuses forces politiques européennes, de la droite populiste à la droite traditionnelle, envisagent désormais le conflit israélo-palestinien comme lune des composantes de la guerre de civilisation contre lislam.
Geert Wilders, le chef du parti populiste néerlandais qui est devenu la troisième force du pays aux élections législatives de juin, vient daffirmer ses vues sur le conflit (« Geert Wilders : Change Jordans name to Palestine », Y-Net, 20 juin) :
« Si Jérusalem tombe aux mains des musulmans, Athènes et Rome suivront. Ainsi, Jérusalem est la principale ligne de défense de lOccident. Ce nest pas un conflit sur le territoire, mais une bataille idéologique entre la mentalité de lOccident libéré et lidéologie de la barbarie islamique. »
Il a donc proposé comme solution de… rebaptiser la Jordanie et de lappeler « Palestine ». Cela, selon lui, suffirait à régler le problème palestinien.
Rappelons que cette idée, « la Palestine cest la Jordanie », fut longtemps défendue par la droite israélienne (notamment après 1967). Le Parti travailliste, lui, prônait loption jordanienne, cest-à-dire la négociation avec le régime hachémite (plutôt quavec lOLP) pour arriver à un compromis territorial qui aurait permis de laisser le soin à la Jordanie de gérer la majorité des habitants de Cisjordanie (et déviter ainsi quIsraël ne se retrouve avec « trop » de citoyens palestiniens).
Dans un précédent envoi sur lattitude de la droite européenne, javais cité Laurent Chambon :
« Une des inventions bénéluxiennes les plus populaires est une extrême droite post-coloniale et post-raciste (en tout cas dans sa forme), qui base son rejet des migrants sur des critères laïcs et progressistes. Le Vlaams Belang de Filip Dewinter en est un bel avatar flamingant et islamophobe, et Pim Fortuyn et sa LPF, Rita Verdonk et son Troots op Nederland (ToN, Fier des Pays-Bas) comme Geert Wilders et son Partij voor de Vrijheid en sont différentes versions néerlandaises. »
La droite dure suisse nest pas en reste. Oscar Freysinger, lhomme à lorigine de la « votation » sur linterdiction de la construction de minarets en novembre 2009, explique : « Notre parti a toujours défendu Israël parce que nous sommes bien conscients que, si Israël disparaissait, nous perdrions notre avant-garde. (&) Aussi longtemps que les musulmans sont concentrés sur Israël, le combat nest pas dur pour nous. Mais aussitôt quIsraël aura disparu, ils viendront semparer de lOccident. » (Cité par Olivier Moss, in Les Minarets de la discorde, sous la direction de Patrick Haenni et Stéphane Lathion, Religioscope-Infolio, 2009.)
Lancien premier ministre espagnol José María Aznar va dans le même sens dans un texte publié le 17 juin par The Times de Londres et traduit sur le site Le¨Post.fr, le 19 juin, sous le titre « José María Aznar : Israël / Occident : notre destin est inextricablement lié ».
« Israël est notre première ligne de défense dans une région turbulente qui risque constamment de sombrer dans le chaos, une région vitale pour notre sécurité énergétique en raison de notre dépendance excessive au pétrole du Moyen-Orient, une région qui forme la ligne de front dans la lutte contre lextrémisme. Si Israël tombe, nous tombons tous. »
Intervenant le 30 juin sur une radio israélienne, Aznar a confirmé :
« Israël ne fait pas partie du Proche-Orient, il sagit dun Etat occidental qui se trouve dans cette région. Cest une démocratie tout à fait normale, qui a beaucoup souffert par le passé et notre rôle consiste à le soutenir en tant que démocratie. » Il a ajouté : « Lorsque nous luttons pour Israël, nous luttons également pour notre propre bien. » (Cité par le site LArgument, « José María Aznar réitère son soutien à Israël ».)
Ces prises de position de la droite dure ou des nouvelles formations populistes européennes confirment un glissement que souligne, pour sen réjouir, un commentateur israélien écrivant dans le quotidien Maariv (24 juin). Il sappelle Nadav Haetzni (partisan, par ailleurs, de retirer le passeport israélien aux Palestiniens vivant en Israël) : « En Europe, il existe des signes de changements vitaux quil faut quIsraël alimente. De nombreux Européens se rendent enfin compte des conséquences dune politique de la porte ouverte à limmigration issue de lAfrique du Nord et des pays arabes. Le côté positif de la venue dune main-dSuvre bon marché est désormais contrebalancé par ce quapportent avec eux nombre de ces immigrants : lextrémisme et une volonté dimposer lislam à la vieille Europe. A Amsterdam, Paris et Madrid, on se réveille finalement et on est terrifié par la direction qui est imposée à lOccident. Cette prise de conscience permet de mieux comprendre ce que nous avons eu à affronter depuis la naissance du sionisme politique. Il est donc temps (…) de commencer à écouter ces nouvelles voix venues dEurope. »
Cela fait de nombreuses années que des journalistes ou des intellectuels dénoncent linvasion musulmane de lEurope, de Bat Yeor, qui fut une pionnière, à Alain Besançon. Dans le monde anglo-saxon, les livres sur ce thème sont pléthore. Ce discours est désormais relayé par certains partis de la droite populiste ou extrême ; abandonnant lantisémitisme pour lislamophobie (un tournant que dautres formations comme le Front national nont pas encore assumé, le vieil antisémitisme y restant puissant), ils proclament quIsraël serait le bastion avancé de la civilisation dans sa lutte contre la barbarie…
Les blogs du diplo, 5/7/2010

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