“On a essayé de m’enlever la caméra, sous prétexte que je n’avais pas le droit de filmer.” Membre de l’organisation du Forum Social, vêtue de la chemise jaune qui les identifie, Lise, Française, n’en revenait pas, hier, de l’attitude des Marocains qui ont fait irruption dans la salle où était prévue l’activité organisée par des associations de soutien au peuple Sahraoui, pour la boycotter en y “semant un grand désordre”. Le plus tragique, c’est que cela se transforme en tradition dans les forums.
La conférence programmée étaient intitulée “Sahara Occidental : la dernière colonie africaine”, et comptait la présence de l’ex-sénateur belge et président de la Coordination Européenne de Solidarité avec le Peuple Sahraoui, Pierre Galand, et l’eurodéputé espagnol pour Izquierda Unida (Gauche Unie), Willy Meyer. Mais à peine avait-on commencé qu’un groupe de Marocains, présents au Forum et participant à d’autres activités, a commencé à proférer des insultes, envahissant la salle et allant jusqu’à se battre avec ces membres de l’organisation qui tentaient de prendre la scène en photo. Meyer a voulu prendre la parole pour défendre le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination mais il n’a réussi qu’à raviver les esprits des marocains.
Mais il fut le seul à parler, aucun Sahraoui n’eut le temps de dire un mot dans la salle. À coup de coudes, la dispute est finalement passée hors de la salle. L’acte était suspendu, alors certains des participants à ce trouble demandaient du temps pour débattre – ou plutôt pour continuer d’injurier à tue-tête – contre quiconque était prêt à les écouter. Meyer, qui a affirmé qu’il déposerait une réclamation formelle auprès de l’organisation pour réclamer l’expulsion du gouvernement marocain du Forum, lequel il a signalé comme orchestrateur du boycott. Pour l’eurodéputé, “cette attitude fasciste est incompatible avec la Charte des Principes du Forum Social Mondial, et ce n’est pas la première fois que le Maroc organise une action violente dans ce genre d’événements”.
Du côté marocain, Nordin Fatah, membre du parti socialiste, a affirmé que l’acte était libre et qu’on n’assistait que pour écouter et que la provocation est arrivée du côté sahraoui. “Meyer vient à l’aéroport de Laâyoune pour provoquer, on le connaît déjà”, clamait-il. Interrogé maintes fois sur la provocation de ce moment, il a enfin affirmé : “Ils ont sorti les drapeaux.”
Ce qui est sûr, c’est que ni même un espace de dialogue qui prêche un monde plus juste n’est, pour certaines délégations marocaines, un lieu de trêve. Tout comme qu’en décembre dernier, durant le Festival Mondial de la Jeunesse, en Afrique du Sud. Hier aussi, à Bamako, dans le Forum régional africain, plusieurs assistants se rappelaient le même problème.
Laura Gallego,
Guinguinbali, 08/02/2011
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