Il travaillent de soleil en soleil, des interminables heures de travail et poussant leurs fils à l’attelage et le lendemain encore plus difficile et le pain encore plus cher et encore plus riches le riche, le bouffon de palais, le cancanier et le dictateur devient, en plus de satrape, magnat et divinité sur terre, ses paroles sont des verbes divins, sa démarche est angélique, ses gestes, ses regards, ses positions, actions, rêves, erreurs et ronflements sont d’une éminente sainteté, et n’accepte plus que les applaudissements. Ses ouïes ne sont que pour les flatteries, le son trébuchant des monnaies et le subtil frottement du coton des billets…
Mais, étant donné que la convoitise n’a pas de limites, le tyran et sa clique continueront à s’enrichir, le peuple las, se lève un de ces jours et affrontant la peur proclame la désobéissance, la lutte pour les légitimes droits, pour la justice, pour la décence, pour la dignité et instaure la révolution.
Parce que de l’oppression naît la révolution, de l’injustice le droit, de l’opprobre la rébellion, de l’indécence des gouvernants, lorsqu’ils perdent la honte, pousse le manque de respect envers eux.
Ensuite, pour que le peuple gagne ce qui, par légitimité, lui appartient : son droit et tout ce qui fait que l’être humain ait un sentiment de dignité dans les contrées les plus lointains de son pays, doit, inévitablement, verser son sang : noble œuvre mais triste tache.
Je disais, ci-dessus, que le panneau disait : « fermé jusqu’à la chute du régime ». Je l’ai lu plusieurs fois et je me suis demandé, ce bonhomme, avant d’écrire ce panneau, à quoi avait-il pensé? Cet humble commerçant, avait-il pensé à ses enfants? Dans les pertes que la fermeture lui causerait-il? Combien de temps, le satrape, mettra-t-il pour s’en aller? Aurait-il médité longtemps? Ou, au contraire, a-t-il pris la décision en urgence, comme l’exige la révolution?
Je ne sais pas, mais je crois que sa conscience lui a dicté d’œuvrer selon l’urgence de la révolution et que le reste soit comme Dieu le veut. Sûrement, les jeunes égyptiens, à ce moment-là, auraient paraphrasé Daniel Cohn Bendit en l’adaptant à leurs circonstances : Il n’y aura pas de chant funèbre, mais crie de gloire parce que, nous aussi, nous aimons la révolution.
Les vents de liberté se sont posés sur les cimes des arbres, des dunes, des tentes arabes, il y a à peine deux heures Moubarak est tombé et mon ami, le commerçant, aura retiré son panneau. A sa place, après une longue nuit de triomphe et joie, le commerçant apparaîtra avec le grand sourire du victorieux.
La liberté est séductrice et la révolution contagieuse.
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