Démocratie au Maroc selon André Azoulay : Tout et son contraire

Mais pourquoi donc le régime se préoccupe-t-il, à ce point, d’organiser à tour de bras colloques, congrès, symposiums ou conférences où viennent, comme de bien entendu, s’exprimer des « compétences », sur la démocratie, la bonne gouvernance, l’Etat de droit ou encore, comme ce dimanche 18 septembre, à Chichaoua, sur « L’identité marocaine: la richesse et la pluralité, base de la cohésion communautaire » ?
 

Pourquoi ce besoin suspect, de mettre en lumière, voire encenser, notre système politique et sa propension supposée aux exercices vertueux ?
On imagine mal de telles réunions se tenir en  démocratie.

L’invité de marque à ce cette rencontre, André Azoulay, le conseiller du roi, est venu discourir sur la tendance du Maroc à « préserver son identité et son unité nationale entre les différentes composantes de la société et les différentes tendances culturelles, ethniques et religieuses, comme il a réussi à consacrer les valeurs de coexistence et de tolérance ».
 
Il a simplement omis  de préciser que la veille, à Rabat,  le gérant du café où se déroulait la réunion de CAPDEMA, avait sommé, sous la contrainte des autorités,  les intervenants, d’évacuer  les lieux en catastrophe. L’invité de cette conférence n’était  autre qu’Ahmed Assid, membre de l’Institut Royal de la Culture Amazigh, venu débattre des enjeux des lois organiques, relatives à l’Amazigh, prévues par la nouvelle constitution.
Il n’était, tout d’un coup, plus question d’identité marocaine, de démocratie ou de pluralité, mais d’exclusion, de menaces et de coercition.  
On l’aura compris, le pouvoir confisque, à son profit, jusqu’au droit à la parole et ne tolère que passablement les initiatives citoyennes, susceptibles de déboucher sur des propositions, pour faire avancer les affaires de la démocratie.
A contrario, il affiche sa nette préférence pour les rencontres,  aussi dispendieuses  que superflues où les participants dissertent sur la tolérance, la pluralité et toutes ces choses qui relèvent des langues étrangères, sinon étranges, dans le « plus beau pays du monde ».
Au cours de cette caricature de rencontre, Azoulay qui n’aura pas manqué de subir le traditionnel assaut d’amabilités et de compliments,  de la part de ses pairs,  a souligné que le Royaume du Maroc « tirait sa force de la richesse du pluralisme, ce qui lui vaut respect et considération à l’étranger. »
L’éditorial du Matin du Sahara n’aurait pas fait mieux !
Enfin, le conseiller qui, pour mieux énoncer ses platitudes, les illustre en évoquant  « les échanges entre les tribus arabes, berbères, juives et sahraouies, de nature à conforter l’identité nationale et de la préserver », a seulement oublié  de mentionner les tourments et le mépris en lesquels le régime continue de tenir des populations entières, réduites à la misère et soumises à des fonctionnaires du makhzen brutaux, corrompus  et qui participent du maintien de cette dictature supplétive du colonialisme.
Le même jour, comme un pied de nez à ce déploiement d’hypocrisie, un troisième parti politique marocain, après le Parti de l’Avant-garde démocratique et socialiste (PADS) et la Voie démocratique, deux partis d’extrême-gauche, le Parti Socialiste Unifié (PSU), annonçait sa décision de boycotter les prochaines élections.
Bien entendu, comme n’aurait pas manqué de dire De Gaulle, Azoulay et ses semblables peuvent sauter sur leur chaise, comme des cabris, en disant l’identité marocaine ! L’Identité marocaine ! L’Identité marocaine !mais cela n’aboutit à rien et cela ne signifie rien tant qu’une véritable démocratie n’aura pas pris place au Maroc.  
Et ce ne sont pas les laudateurs qui étaient en congrès, ce dimanche, à Chichaoua, qui vont y contribuer.
Par Salah Elayoubi
musique.arabe, 20/09/2011 

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