« Je veux que les cultures de toutes les terres soufflent à proximité de ma maison, aussi librement que possible; mais je refuse d’être renversé par le souffle de l’une quelconque d’entre elles. » (Mahamata Gandhi)
Les cultures ne se clonent pas. Elles peuvent communiquer et s’enrichir dans le respect mutuel des différents « styles de vie », mais la mondialisation des systèmes de valeurs par la superpuissance avant tout militaire met cette chance en péril. Face aux agressions culturelles menées par un bon nombre de pays occidentaux, la résistance dans le Tiers monde s’éveille. La sphère des idées et de la créativité n’obéit pas aux lois du « libre-échange ». Et on n’occupe pas le champ culturelle comme on occupe un champ de batailles…
« Pourquoi y a-t-il pauvreté? Il faut comprendre les causes de la pauvreté et ne pas se contenter de quelques élans de charité. La charité ne remplace pas l’âme charitable. Il ne peut y avoir développement avec cette charitable. Il ne peut y avoir développement avec cette charité. Arrêtez votre aide. Gardez votre aide pour vous…cessez de donner des miettes aux gens pour qu’ils ne se révoltent pas. »
« Aujourd’hui l’information conditionne nos connaissances, nos emplois, nos modes de vie et nos systèmes de valeurs. Elle contribue à l’immatérialisation de l’économie où la matière est de plus en plus remplacée par les produits de l’innovation. Un exemple de cette immatérialisation est l’invention de la fibre optique dont 50 grammes permettent d’assurer le même nombre de communications téléphoniques que 33 tonnes de fil de cuivre. Le passage à une société de savoir se reflète sur le plan économique par l’énorme poids que le secteur de la communication a pris dans l’économie mondiale. La société du savoir est une société qui publie 2 millions d’articles scientifiques dans 60.000 revues spécialisées, soit 4 articles par minute. Une société dont le vocabulaire scientifique s’enrichit de 40.000 nouveaux mots chaque année. Faut-il rappeler que 90% de la totalité du savoir humain ont été produits au cours des trente dernières années selon les estimations de Richard Knight? »
« Au Maroc nous vivons grâce aux emprunts, et certains sont heureux d’obtenir un financement de l’ambassade de France pour promouvoir des activités culturelles. Mais n’est-ce pas là une insulte à un pays qui possède les moyens de dépenser des millions de dirhams pour des activités superflues que de ne pas être capable de trouver quelques milliers de dirhams pour financer une réunion de ce genre? Non point que je sois contre la coopération, mais quand vous adhérez à une société d’emprunt, vous calquez les formes et les modèles des autres. Vous n’empruntez pas seulement la langue, mais aussi le signe et l’image. Or, l’image trahit.Elle vous trahit quand elle ne fait pas partie de vous-même. Cela saute aux yeux et choque. »
« L’analphabète d’aujourd’hui est celui qui ne sait pas désapprendre pour pouvoir apprendre à réapprendre. Je pense que la nécessité de mettre à jour ses connaissances est une cause majeure de l’exode des compétences. Jamais la définition du savant par le Général de Gaulle n’a été aussi pertinente: « un savant est celui qui connaît l’étendue de son ignorance. Je crois que le sous-développement peut se définir aujourd’hui comme une situation où l’on combat les compétences nationales innovatrices et créatrices et où l’on encourage la somnolence professionnelle et la médiocrité docile qui facilitent la corruption, l’abus des droits humains et la servilité devant les grandes puissances »
« Le problème de la femme est trop important pour être réduit uniquement à des textes. C’est au niveau des structures mentales, de l’éducation, de la véritable participation de l’intéressée à l’élaboration des normes et à l’évaluation des pratiques quotidiennes envisagées pour améliorer son sort qu’il faudrait peut-être agir – et sans « droit d’ingérences » d’instances extérieures. »
« Les investissements étrangers, le tourisme…tout cela est bien veau mais n’apporte rien à la majorité de la population à moins que l’on revoie les priorités. A chacun ses préférences: la vitrine pour l’étranger? Ou l’intérieur de la boutique? Néanmoins le maquillage n’a jamais fait de mal à personne. Ce n’est pas un ballon de football qui relancera l’économie d’un pays qui tourne en rond sans tourner rond encore. »
« L’internet apportera au Maroc, ce que le Maroc apportera à l’internet. C’est une interactivité. Je m’explique le réseau apportera certaines choses, en fonction de ce que nous pouvons donner pour créer un cercle virtuel qui pourra dynamiser le pays, et en même temps rayonner à l’extérieur du pays. Un spécialiste de la communication a dit qu’il fut un temps où les structures étaient définies par ce qu’elles pouvait faire de nous ; aujourd’hui, elles sont de plus en plus définies par ce à quoi elles sont connectées. En résumé: « Dis-moi à quoi tu es connecté et je te dirai qui tu es »….Être sur internet ne devrait pas être un phénomène de mode ou de standing. Si on négocie la construction de son site sur des conditions enviables d’esthétique, avec un fond de page de telle couleur, une image avec telle résolution ou avec une animation en trois dimensions, on passe à côté de l’essentiel. Où est le contenu? Où est la mise à jour? »
« Pour ce qui de l’avenir de l’Islam, que ce soit au Maroc ou ailleurs les faits sont là. En 1976, le Vatican annonçait que le nombre des musulmans était de 976 millions et qui dépassait pour la première fois dans l’histoire celui des catholiques qui s’élevait à 950 millions. Ce dernier chiffre n’a pas beaucoup évolué alors que le nombre de musulmans n’est pas loin de 1500 Milliard soit un doublement en moins de trente ans. Cet avenir n’est pas seulement quantitatif, il est surtout qualitatif grâce à l’Asie où vivent actuellement près des deux tiers des musulmans du monde. Un continent qui évolue à pas de géant grâce à l’éducation, la science, l’innovation et la créativité et surtout grâce à une démocratisation non-aliénée et non-aliénante qui respecte les systèmes des valeurs culturelles des sociétés concernées. C’est ainsi que l’on accède à la modernité sur mesure qui n’est pas celle du prêt-à-porter importée et encore moins celle du PAP (prêt-à-penser). Cela n’est malheureusement pas encore le cas dans le monde arabo-africain.
« Les pays pauvres, ce ne sont pas ceux qui n’ont pas de ressources naturelles tels que le gaz ou le pétrole mais ce sont ceux qui ont leurs artistes et vivent sans art. L’art en matière d’esthétique, c’est dans les composantes de l’esprit et dans la relation avec le beau qu’il faut rechercher. Toute personne vivant dans l’ignorance ou dans la négation du beau est pour moi un individu mort-vivant. »
« Ce qui me vient maintenant à l’esprit, c’est cette remarque de l’historien africain Ki Zerbo: » Les singes ont un bien meilleur comportement que les dirigeants du Tiers monde, quand vous faites un geste devant un singe il vous imite sur-le-champ, sans attendre. Alors que les décideurs dans le Tiers monde attendent longtemps et sont toujours en retard d’une grimace. » Voilà pourquoi les réformes dans nos pays prennent au moins 5 à 10 de retard, pour n’être en fin de compte que de pâles copies désuètes venues d’ailleurs. Il est triste que notre avenir ne soit envisagé qu’à partir du passé des autres.»
La Trace, 23/8/2010
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