Alger et Madrid tentent d'aplanir leurs contentieux sur le gaz

Audience de courtoisie ou audience studieuse de travail pour aplanir les divergences entre les deux pays? Même si rien d’important n’a filtré de l’entretien qui s’est déroulé à Alger lundi 7 septembre entre le ministre algérien de l’Energie et des Mines, Youcef Yousfi, et le ministre espagnol de l’Industrie, du Tourisme et du Commerce, Miguel Sebastien, tout porte à croire que les deux responsables ont du évoquer les sujets de tension entre Alger et Madrid.

Même si le communiqué officiel ne le dit pas directement, il reste évident que les différents qui opposent la compagnie nationale des hydrocarbures Sonatrach aux compagnies espagnoles Gas Natural et Repsol étaient au centre des entretiens entre les deux ministres. Selon le communiqué du ministère de l’Energie, les discussions « ont porté notamment sur le développement et le renforcement des relations de coopération entre l’Algérie et l’Espagne dans le domaine énergétique». Du langage diplomatique en somme. Dans le fond, il semble que les différents sont aplanis et que le gaz algérien coulera encore à grands flots en Espagne et selon les conditions algériennes, avec l’entrée «prochainement» en exploitation de Medgaz, le second gazoduc reliant les deux pays après celui de GME qui passe par le Maroc.

L’Algérie, premier fournisseur de gaz naturel de l’Espagne, devant le Nigeria et le Qatar, couvre prés de 25% des besoins de ce pays en gaz. Les deux pays sont reliés depuis 1996, via le Maroc, par le gazoduc Maghreb Europe (GME) qui alimente également le Portugal. Un deuxième gazoduc «Medgaz» reliant Béni-Saf en Algérie à Almeria en Espagne, dont la réalisation et la mise en gaz viennent d’être finalisées, sera opérationnel prochainement. Le projet, dont la mise en service initiale était prévue en 2009, livrera à l’Espagne environ 8 milliards de m3 de gaz par an et devrait augmenter les exportations gazières algériennes et partant sécuriser l’approvisionnement de l’Europe en gaz naturel. L’entreprise algérienne Sonatrach est autorisée dans le cadre de ce projet à commercialiser prés de 3 milliards de m3/an directement sur le marché espagnol au lieu d’un milliard de m3/an imposé auparavant par la Commission nationale espagnole de l’énergie (CNE), l’organisme régulateur du secteur en Espagne.
Si les deux pays sont liés par de fortes relations dans le domaine de l’énergie, il reste néanmoins que deux contentieux commerciaux ont opposé leurs compagnies énergétiques et dont le groupe algérien Sonatrach a eu gain de cause, dans les deux cas. En 2007, Sonatrach avait réclamé, une hausse de 20% de ses prix du gaz, vendu à Gas Natural et acheminé en Espagne à travers le GME. Sonatrach avait, à cette époque, émis le souhait de renégocier ses prix de vente, en application d’une clause «de bouleversement», prévue par les contrats de vente de gaz à l’entreprise espagnole et qui stipule une révision à la hausse des prix du gaz à chaque fois que les prix du pétrole augmentent, le prix du gaz étant indexé sur celui du pétrole. A partir de 2007, les prix du pétrole avaient connu une hausse vertigineuse et sans précédent franchissant la barre des 150 USD pendant longtemps. En août 2010, la Cour d’arbitrage de Paris a statué en faveur de Sonatrach dans ce conflit. Gas Natural pourrait être obligé de payer rétroactivement quelque 1,5 milliard d’euros à la compagnie algérienne à la suite de cet arbitrage.
Le litige qui a opposé la compagnie nationale à l’espagnole Gas Natural, n’est pas le premier du genre à avoir «tiédi» les relations entre l’Algérie et l’Espagne. Un autre litige opposant la compagnie nationale à des entreprises ibériques a lui aussi du être réglé après intervention de la justice internationale. Ce dernier se rapporte au projet de liquéfaction de Gassi Touil, dans lequel Sonatrach reprochait aux compagnies Gas Natural et Repsol, le non respect de leurs engagements. Les retards de l’entrée en fonction du complexe en 2009 leurs avaient d’ailleurs étaient imputés par la Compagnie nationale. En novembre 2009, un tribunal arbitral de Genève en Suisse avait aussi donné gain de cause à Sonatrach. Le tribunal genevois a décidé que la Sonatrach n’avait pas à indemniser Gas Natural Repsol. Mieux, il avait annulé le contrat liant les trois partenaires, et Sonatrach devait racheter la participation de ses deux anciens associés. Ni Repsol, ni Gas Natural n’avaient récupéré les sommes qu’elles avaient respectivement investis dans le projet.
Par Chahrazade Lamrikène
DNA, 7/9/2010

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