Les craintes de Ross sont justifiées

A l’issue de son entrevue lundi avec le monarque marocain, l’envoyé personnel du Secrétaire général des Nations unies, Christopher Ross, a annoncé que la troisième réunion informelle entre le Maroc et le Polisario aura lieu en novembre prochain. Mais en prenant la précaution d’ajouter qu’il y a «impérieuse nécessité d’atténuer la tension qui prévaut et d’éviter tout ce qui est de nature à assombrir le climat ou à entraver le progrès lors du prochain round des négociations».

Or, la tension est précisément très lourde au Sahara Occidental, où entre quinze et vingt mille personnes se sont retranchées dans un campement de toile près de la ville de Laayoun pour protester contre leurs conditions sociales et les violations répétées de leurs droits par les forces d’occupation et qu’un blocus établi par celles-ci prive de tout approvisionnement en nourriture, eau et médicaments. Situation qui a déjà dérapé avec la mort d’un adolescent tué par les auxiliaires du Makhzen, alors qu’il tentait, avec d’autres qui ont été blessés, de rejoindre ses compatriotes retranchés.

Mais elle risque de tourner à la catastrophe humanitaire au cas où il n’y aurait pas d’intervention urgente de la part de la communauté internationale en faveur de ces milliers de personnes livrées à l’arbitraire barbare du Makhzen. Si cette catastrophe humanitaire sur laquelle le Polisario a mis en garde devait effectivement survenir, l’on voit mal comment pourrait avoir lieu une rencontre, fût-elle informelle, entre les représentants légitimes de cette population sauvagement réprimée par le Makhzen et ceux de ce dernier.

Ce n’est pas à atténuer la tension, comme demandé par Christopher Ross, qu’agissent les autorités marocaines en affamant et réprimant les personnes qui se sont regroupées pacifiquement près de Laayoun. Elle l’exacerbe au contraire.

Car le Polisario ne peut rester sans réagir d’une façon ou d’une autre devant les agissements marocains. La réaction à laquelle le Makhzen voudrait le pousser est justement celle de renier l’engagement obtenu de lui par l’envoyé personnel du Secrétaire général des Nations unies d’aller en novembre à un troisième round de négociations informelles. Ce qui ferait claironner à la propagande de Rabat l’antienne de la mauvaise foi du Polisario.

La manœuvre est cousue de fil blanc mais révélatrice du désarroi dans lequel se trouvent le trône et les autorités marocaines, avec ces milliers de Sahraouis regroupés dans le camp «Istiqlal» et les défiant pacifiquement en revendiquant le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination et un Front Polisario conforté par leur courageuse détermination et donc sans esprit de concession au fameux projet royal de statut de décentralisation pour le Sahara Occidental.

Si tension il y a qui risque de remettre en cause la rencontre de novembre, elle n’est pas le fait du Front Polisario, mais celui du Makhzen qui n’hésite pas à mettre en péril l’intégrité physique de milliers de citoyens sahraouis qui n’ont pour tort que de protester pacifiquement contre l’occupation et ses néfastes conséquences.

C’est à la communauté internationale d’agir vite et fermement pour empêcher la survenue de la catastrophe humanitaire annoncée et contraindre le Maroc au respect de la légalité internationale que l’ONU a traduite par ses résolutions pertinentes sur le Sahara Occidental.
par Kharroubi Habib
Le Quotidien d’Oran, 27/10/2010

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