Un sujet, à la Une : La marche du million, hier, au Caïre.

Un million défie Moubarak titre le Financial Times ; et c’est évidement, ce matin, l’image de ce jour. On ne sait laquelle choisir d’ailleurs car la plupart de vos journaux montre cette foule. Dense. Immense. Rassemblée sur la place El Tharir, la place de la Libération. Des calicots, des drapeaux. Des hommes en prières, d’autres qui rient, des femmes, des enfants. Des soldats aussi qui observent, presque placides. A la Une du Volkskrant, un détail de cette foule : 3 fillettes – tout sourire – debout sur un char de l’armée, et de la tourelle du char, un soldat, casque sur la tête, qui semble leur dire : Les enfants, vous êtes sur un char. Attention, c’est haut, il ne faudrait pas tomber. 
Et dans cette presse, la manifestation d’hier continue de faire les titres. Imaginez, un million de protestataires, peut-être plus. Au Caïre, la foule réclame le départ du président annonce l’International Herald Tribune. Die Welt affine ce message : L’opposition lance un ultimatum. Moubarak doit partir d’ici vendredi (complète le Frankfurter Allgemeine). El Pais pointe l’entêtement du président : Moubarak refuse de démissionner… « – Je mourrai en Egypte.». Faut-il alors s’attendre à vivre – comme l’annonce le Volkskrant encore 8 mois avec Moubarak ? L’homme en tout cas est de plus en plus isolé sur la scène internationale, assiégé, pour le Figaro qui estime que Moubarak cherche une sortie « par le haut. » Des tractations sont engagées pour amener le président à déléguer ses pouvoirs et à ne pas se présenter à un nouveau mandat. En coulisses, Washington s’active. L’administration Obama discute avec toutes les parties pour faciliter une sortie de crise ‘ordonnée’. Ainsi, plusieurs quotidiens européens rapportent la présence en Egypte de Frank Wisner, ancien ambassadeur au Caïre et mandaté par l’administration américaine pour rencontrer les hauts responsables égyptiens. De quoi provoquer encore pas mal d’inquiétude côté Israélien. « Jimmy Carter avait laissé tomber le chah d’Iran. Obama est en train de faire pareil avec Moubarak ». Un constat – amer – dressé par des responsables israéliens – et anonymement rapporté par le Figaro. 
Et c’est l’un des points abordés ce matin, dans la presse. Plusieurs quotidiens s’interrogent sur l’après Moubarak, non plus en Egypte, mais dans toute la région.
Avec cette déclaration du chef de la diplomatie iranienne, Ali Akbar Salehi a dénoncé les ingérences américaines dans le mouvement populaire, a assuré que Téhéran allait proposer son aide aux manifestants et a surtout annoncé l’arrivée d’un Moyen-Orient islamique. Sans doute plus un vœu pieux qu’une analyse géostratégique.
N’empêche, le Figaro fait un rapide tour des états arabes. En Jordanie, le roi Abdallah II a remplacé son premier ministre par son ancien conseiller militaire. Choix déjà critiqué par l’opposition islamiste. Sur l’autre rive du Jourdain, dans les territoires palestiniens, le Fatah, en Cisjordanie comme le Hamas, à Gaza se sont retrouvés sur un point : ils ont interdit tout rassemblement en solidarité avec le peuple égyptien. Mahmoud Abbas n’a pas hésité à heurter – dimanche – son opinion publique en téléphonant à Moubarak, pourtant rival pendant longtemps de Yasser Arafat. Dans la plupart des états, les dirigeants arabes continuent de nier tout risque de contagion. Mais dans le même temps, le contrôle de leur population se durcit. En Syrie, Bachar el-Assad a déclaré que « le parti Baas (à la tête du pays depuis un demi-siècle) est étroitement en phase avec les sentiments du peuple. » Il ajoute « aucun mécontentement populaire n’est perceptible », mais depuis 3 semaines, rapporte encore le Figaro, le leader syrien multiplie les demandes auprès de ses chefs de services de renseignement. Il faut occuper le terrain. Le Maroc cherche à afficher la sérénité, mais déjà, une déclaration du cousin du Roi Mohammed VI a fait du bruit. Il ne faut pas se tromper, presque tous les régimes autoritaires seront affectés par la vague de protestation. Le Maroc ne sera probablement pas une exception.
RTBF.BE, 2/02/2011

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