Tags : Chine, Ukraine, Russie, Iran, Arabie Saoudite,
par Abdelkrim Zerzouri
La Chine est-elle en voie de s’imposer en tant que médiateur discret et efficace dans les conflits et les crises qui secouent de nombreuses régions dans le monde ? La visite du président chinois Xi Jinping à Moscou la semaine prochaine pour y rencontrer son homologue russe Vladimir Poutine sera l’occasion pour la Chine de mettre en œuvre son plan de paix en Ukraine, qui a été révélé en février dernier. Quand il a été rendu public, en février 2023, alors que le conflit ukrainien bouclait sa première année, l’ONU l’a estimé comme une « contribution importante », mais les alliés de Kiev ont fait la fine bouche, doutant de la partialité de Pékin en raison de sa position d’allié de la Russie, mais les choses semblent évoluer vers une meilleure disponibilité de ces parties face à cette initiative.
Plusieurs raisons poussent les Américains et les Européens à accepter la médiation chinoise, l’influence dont bénéficie le leader chinois auprès de son homologue russe, ainsi que le contact annoncé dans ce contexte entre les présidents chinois et ukrainien immédiatement après la visite du président chinois à Moscou. « Nous pensons qu’il est très important que les Chinois entendent le point de vue des Ukrainiens et pas seulement celui de Vladimir Poutine », a indiqué dans ce sens le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, John Kirby.
Mais, pouvait-on imaginer un seul instant qu’un tel plan de paix puisse ignorer l’une des parties en conflit, en l’occurrence l’Ukraine, pour faire une déclaration pareille ? Evidemment que les Chinois doivent entendre le son de cloche des Russes et des Ukrainiens, un principe de la médiation, pour rapprocher les positions entre les deux pays en conflit. Quelle chance peut avoir ce plan de paix proposé par la Chine pour mettre fin à la guerre en Ukraine ?
En apparence, en étant très optimiste, on peut lui accorder un crédit de moins de 50%, tellement les deux parties en conflit campent sur des positions intransigeantes, conduisant le conflit vers un durcissement des opérations militaires sur le terrain, avec un engagement de plus en plus fort des alliés de Kiev à travers le renforcement du soutien en armements et des sanctions économiques contre Moscou. Mais, qui aurait accordé un infime taux de réussite à la médiation chinoise entre l’Arabie Saoudite et l’Iran ?
Malgré tous les paramètres défavorables, la Chine croit en son plan de paix en Ukraine, et elle est la seule à avoir le détail de la potion diplomatique à mettre à l’œuvre pour y arriver. Car, même si la diplomatie chinoise à révélé les points de plan de paix, il est clair que tout ne peut pas être dit publiquement dans le cadre de cette médiation qui nécessite de la discrétion et de probables changements de données en cours de route. Et puis, la Chine n’est pas isolée dans son action.
Il y a également l’Algérie, dont le président Abdelmadjid Tebboune doit se rendre à Moscou, en mai, qui est engagée dans une initiative très discrète dans ce sens, et qui a été sollicité tout récemment par le haut représentant de la diplomatie européenne, Joseph Borell, de mettre tout son poids pour aboutir à la paix.
D’autres pays œuvrent également dans ce même état d’esprit pacifique, vers lequel doivent converger tous les efforts. La guerre, quelle que soit sa durée, se termine toujours autour d’une table de tractations.
Le doux entrisme de Pékin
par Abdou BENABBOU
Le voyage du président chinois à Moscou dans les prochains jours revêt, dans la conjoncture actuelle, un caractère particulier. Rien ne prouve que la Russie et la Chine se sont engagées dans une alliance sans limite comme l’affirme Vladimir Poutine, mais cette visite n’est néanmoins pas anodine.
Bien qu’elle réclame elle aussi sa paternité sur Taïwan, en menaçant d’utiliser la force si nécessaire en laissant transpirer une parallèle identique avec celle de l’affaire ukrainienne, sa diplomatie actuelle n’a pas un visage de va-t-en-guerre. Sa carapace de grande puissance économique mondiale lui permet d’utiliser d’autres arguments plus efficaces que l’utilisation de la poudre à canon. Elle se sert aujourd’hui de la discrétion pour s’investir en actrice incontournable dans le maillage et le démaillage des rapports entre les nations. Pour preuve, la réconciliation inattendue entre l’Arabie Saoudite et l’Iran a été, affirme-t-on, de son seul ressort. Sa présence de plus en plus marquée à travers le monde est indéniable et la particularité de son influence ne se manifeste que sur le terrain économique.
Pour Pékin, les conflits armés et les tensions guerrières ne militent pas pour la montée en puissance de son économie. Malgré quelques sautes d’humeur épisodiques, les autorités pékinoises donnent l’impression de surfer sur des événements dangereux survenant à travers le monde et accordent une préférence à rentabiliser et fructifier leur spectaculaire développement industriel. Leur stratégie dégage une évidente forme d’entrisme doux. Les avancées de la présence chinoise partout dans le monde sont indéniables mais ne revêtent pas les habits des néocolonialismes classiques.
S’il est déclaré à Moscou que le président chinois se rend en Russie pour renforcer une plus large collaboration bilatérale dans tous les domaines sans exception, il est certain que Pékin ne se départira pas d’une ligne de conduite qui a jusqu’ici montré ses fruits. Il sera donc aussi certain que le chef de l’Etat chinois aura fort à faire pour proposer à son homologue russe une issue de sortie de la crise ukrainienne.
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