Prof. Giovanni Teresi
L’une des raisons qui a motivé l’initiative de ce congrès ayant pour titre “Le désir du français dans le monde “ répond à la volonté d’entamer le premier stade d’une série d’études ou de rencontres conçues comme des moments significatifs d’analyse et de confrontation sur l’importance des langues néolatines dans la région méditerranéenne et au-delà de celle-ci (donc dans la partie restante du monde). Comme l’on sait très bien, depuis des millénaries les échanges commerciaux ont contribué à la diffusion des traditions, des arts et de la communication au sens le plus général du terme entre les gens aux différents credos religieux. Certainement en Sicile, cette variété de provenance parmi les conquérants n’a jamais fait défaut, à tel point qu’à ce multiple kaléidoscope ethnique a fait contrepoids la diversification du substrat culturel, des coutumes, du droit, des moyens d’expression artistique et littéraire, dont partie intégrante devient aussi la contribution culturelle de la France, laquelle n’est pas d’ailleurs moins présente dans les pays de l’Afrique du Nord.
Pour faire un exemple, dans le dialecte sicilien aujourd’hui il est possible de repérer une multitude de mots dont la dérivation est aussi variée que la souche multiforme des vicissitudes dominatrices qui l’ont pérennement marquée.
De nos jours on assiste avec joie à un changement de mentalité tendant à dépasser la méfiance et les préjugés qui, au fil des siècles, ont divisé les peuples situés sur l’une et l’autre rive de la Méditerranée, et qui ont malheureusement fait peser sur la culture de l’autre rive des malentendus fortement occidentaux.
Il faut dire que dans beaucoup de pays africains (trente exactement), malgré la soif de revanche qui a mené ces peuples à récupérer leurs patrimoines culturels respectifs, le recours à la langue française ne cesse pas de symboliser l’accès à l’âge moderne, constituant par ce fait même une valeur indépassable.
Si donc auparavant elle avait été ravalée à un symbole d’aliénation, par la suite elle a été considérée comme un moyen important de progrès et de développement.
Il s’ensuit que l’assimilation du français par ces populations et surtout par les jeunes générations a comporté une régionalisation de cette langue, ce qui signifie qu’elle s’est bien enracinée dans la mentalité, devenant de la sorte patrimoine endogène inaliénable.
L’histoire de l’Italie est irrécusablement liée à la Méditerranée par l’art, l’amplitude des échanges commerciaux et culturels, la pratique du bon voisinage.
De ce point de vue, l’espace méditerranéen enrichit et complète l’Union Européenne.
Le Maghreb est depuis toujours une région-clé pour les intérêts économiques italiens: à présent les Pays de la région (Libie, Algérie, Maroc) expérimentent une croissance particulièrement sensible et offrent de nombreuses opportunités pour les entreprises italiennes, soit du point de vue de l’import/export, soit pour ce qui concerne les investissements directs ou la délocalisation des entreprises.
Le secteur énergétique doit attirer davantage notre attention, car il est le secteur majeur où l’Italie joue un rôle primaire.
L’Italie a été depuis longtemps l’un des partenaires économiques les plus privilégiés des Etats du Maghreb. D’après l’évaluation de Confindustria, l’échange avec la région africaine a atteint jusqu’à présent 39 milliards d’euros (cette activité représente le 11% de l’exportation du Ministère des Affaires Etrangères -MAE).
Ces chiffres prennent en considération l’espace maghrébin dans sa totalité. Si l’exportation italienne vers le Mghreb est basée principalement sur les machines, les pièces mécaniques et les dérivés du raffinage pétrolier, de l’Afrique du Nord viennent en particulier le pétrole brut et le gaz naturel, d’après une valeur (dont l’estimation est tout à fait récente) proche du chiffre de 24 milliards d’euros.
En effet l’Italie importe de la région susdite plus qu’elle ne réussit à y exporter.
La bilan toujours négatif est principalement dû aux grandes quantités d’hydrocarbures importés, lesquels pèsent lourdement sur la balance commerciale.
C’est pourquoi on est amené à considérer que le secteur le plus important capable de marquer davantage les rapports économiques (autant que politiques) entre l’Italie et les pays du Maghreb est celui de l’énergie. L’Italie, quatrième pays mondial qui importe le gaz naturel, puise le 33% de ses nécessités dans les réserves algériennes et libiennes (dont ENI), ce qui met en évidence la puissance des entreprises qui opèrent dans ce secteur.
L’Italie vante des liens commerciaux avec l’Algérie depuis des décennies: le premier gazoduc (le Transmed) a été construit entre la fin des années Soixante-dix et le début des années Quatre-vingts, et il est géré par l’ENI et la Sanatrach, la compagnie pétrolière d’Algérie.
Le gazoduc algérien part du désert, passe par la Tunisie et la Sicile, et débouche dans la vallée de la Padanie. La dernière phase concernant l’élaboration de la construction du gazoduc GASL (devant relier l’Algérie et l’Italie continentale par la Sardaigne) vient de s’achever.
Ces entreprises italiennes sont présentes de la même manière dans les infrastructures.
Quant à la Libie, les liens sont maintenus autant qu’avec l’Algérie; l’ENI y contrôle le 50% du Western Libyen Gas Project.
La présence capillaire et constante des entreprises petites et moyennes dans le Maghreb est vitale pour l’Italie: la région de l’Afrique du Nord répond tout particulièrement aux exigences de ce type d’investissements, étant donné qu’elle fournit une riche ressource en main-d’œuvre à bas coût et qu’elle offre d’excellentes opportunités de délocalisation des entreprises.
Parmi le pays du Maghreb le Maroc n’a pas de forte incidence dans la balance commerciale: l’échange de ce dernier avec l’Italie s’arrête à environ plus deux milliards d’euros, ce qui met en évidence le quantité plus faible de ressources en énergie par rapport aux autres pays voisins.
Dans ce cas l’import/export se base sur l’habillement, la pêche, les produits chimiques et les outils industriels. Comme cela arrive pour la Tunisie, quoiqu’en moindre mesure, le tourisme et le transit de perfectionnement ont une grande importance dans la balance commerciale entre Rome et Rabat.
D’emblée la situation économique des Pays du Maghreb ne se présente pas homogène: au niveau d’une croissance démographique assez sensible ne correspond aucune solution du chômage persistant, dont la cause réside principalement dans le manque d’articulation du système économique et dans les conflits intérieurs entre les zones rurales et urbaines.
On ne peut ignorer non plus que les précaires conditions politiques, ainsi que les problèmes touchant les divers états situés dans cette partie d’Afrique (entre autres, la violence organisée et le terrorisme), ont un poids remarquable dans la vie économique (non seulement intérieure, mais aussi extérieure).
Un problème non moins significatif, c’est le manque d’intégration au niveau régional, et ce malgré la création de l’Union du Maghreb arabe (UMA), laquelle devrait favoriser la coopération entre les gouvernements, aussi bien politique qu’économique. Dans la réalité il n’existe aucune tentative de rapprochement, au moins jusqu’à présent.
En face de ce manque touchant gravement les rapports de bon voisinage, on remarque la mise en place de la part de ces états d’une entente avec les Etats-Unis et les pays européens (comme la France, l’Italie et l’Espagne).
En effet, les liens avec les anciennes puissances coloniales restent très solides (la France pour l’Algérie, la Tunisie et le Maroc; l’Italie pour la Libie).
On a tendance à ignorer, à ce propos, le traité de Barcelone, connu sous la dénomination “Déclaration” de Barcelone de 1995.
Cette déclaration jetait les bases concrètes et humaines pour une entente positive et efficace entre les deux “rives” de la Méditerranée.
Nous savons que le danger représenté par la menace du terrorisme, autant que l’absence d’une réelle adhésion aux valeurs démocratiques, dans cette région, n’intéressent pas que cette dernière: leur persistance finit par fruster et rendre difficile toute relation avec l’autre “rive” de la Méditerranée (L’Europe).
Nous pouvons énumérer les facteurs décisifs favorables au développement et à la croissance économique: stabilité et fondement légitime politique ayant pour base la démocratie; certitude du droit; respect sacré des droits de l’homme et de sa liberté; libéralisation du commerce; progressive intégration des économies; défense et protection du milieu social et naturel.
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