Réformes constitutionnelles en trompe l’oeil

Dans un discours à la nation dans la soirée de vendredi le souverain marocain, Mohammed VI a présenté le projet de reformes constitutionnelles, qu’il soumet à référendum des le premier juillet prochain. Des reformes qui sont loin de satisfaire l’opposition et de larges couches de la société marocaine qui voient dans ces annonces qu’un simple «toilettage» de la Constitution, le souverain marocain gardant la quasi totalité de ses prérogatives. Ces reformes ne sont en rien une remise à plat de la Constitution qui fait du roi un monarque de droit divin et le Commandeur des croyants.

Ce que lui contestent les islamistes du mouvement de cheikh Yassine, qui rappelle qu’en islam il n’y a ni guide ni conducteur des croyants. On est donc loin «d’une Monarchie constitutionnelle, démocratique, parlementaire et sociale», comme l’a annoncé le roi, souligne l’opposition marocaine qui a appellé a manifester, continuant le cycle de protestations hebdomadaires.

Sur les changements qui devraient être opérés dans le pays, les différents mouvements politiques ont chacun leur position. Les islamistes veulent une République islamiste, sans jamais en prononcer le nom. La bourgeoisie souhaite, elle, une Monarchie constitutionnelle, mais le dit timidement. Mohammed VI tiendrait alors un rôle comparable à celui de Juan Carlos en Espagne ou Élisabeth II au Royaume-Uni. Une thèse également défendue par Moulay Hicham El- Alaoui, cousin du roi et troisième dans l’ordre de succession au trône. Ce dernier, considéré comme l’enfant terrible de la dynastie Alaouite, s’oppose à la Monarchie absolue qu’il considère comme un modèle révolu. Mais victime de menaces au Maroc, il vit désormais à Princeton (États-Unis) où il a fait ses études. C’est un personnage qui va prendre de l’ampleur auprès des progressistes parce qu’il va dire haut et fort qu’il s’agit ici de «réformettes», estimet- on dans la capitale marocaine au grand dam des Policy makers français qui auraient poussé le roi à des «réformettes» pour éviter une explosion aux conséquences imprévisibles pour le trône.

Quoiqu’il en soit le mouvement contestataire qui revendique des changements politiques profonds au Maroc a appelé à manifester dimanche, jugeant insuffisantes les réformes de la Constitution annoncées par le roi Mohammed VI. Le Maroc a appelé à manifester ce dimanche. «Le projet tel qu’il a été proposé par le roi ne répond pas à nos revendications pour une véritable séparation des pouvoirs. Nous protesterons pacifiquement dimanche contre ce projet », a déclaré hier Najib Chaouki, l’un des membres de la section de Rabat du Mouvement du 20 février.

Ce Mouvement de jeunes revendique des réformes politiques profondes et une Monarchie parlementaire et manifeste régulièrement dans la rue depuis cette date. «Les Coordinations nationales (du Mouvement) ont appelé à manifester dimanche pour une Constitution véritablement démocratique et une Monarchie parlementaire», a-t-il ajouté. Des manifestations sont prévues notamment à Rabat, Casablanca, Tanger (nord), Marrakech (sud) et Fès (centre), précise la page Facebook du Mouvement, qui compte plus de 60 000 membres.» Ce projet de constitution ne change pas grand chose par rapport au texte actuel», a déclaré pour sa part Mina Bouchkioua, enseignante et membre du Mouvement à Rabat.

Les islamistes représentés au Parlement ont de leur côté réservé leur réponse tout en notant des progrès. Le souverain marocain avait promis en mars dernier des réformes politiques importantes pour répondre aux manifestations qui se déroulent au Maroc depuis le mois de février, à l’instar de ce qui s’est passé dans d’autres pays arabes. Selon le projet de reformes constitutionnel, le roi est toujours le Commandeur de croyants et il se voit confirmé comme la seule autorité religieuse du royaume.

Par ailleurs, le Conseil supérieur des Oulémas, la plus haute instance religieuse présidée par le monarque, est mentionnée pour la première fois dans un texte constitutionnel. Sur le plan politique, le roi préside toujours le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire et les jugements sont prononcés en son nom, comme dans l’actuelle Constitution. Cette disposition est considérée par les opposants au projet comme une atteinte au principe de séparation des pouvoirs.

Le souverain roi reste aussi un acteur important du pouvoir exécutif, puisqu’il préside le Conseil ministériel, au sein duquel les grandes stratégies de l’État sont déterminées, selon le nouveau projet.Il demeure également chef des armées et présidera un «Conseil supérieur de sécurité», qui aura pour mission de gérer les questions sécuritaires internes, structurelles et imprévues».

Le Courrier d’Algérie, 19/06/2011

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