Hans-Christian Stroebele : "Les ressources du Sahara Occidental ne doivent pas devenir une malediction pour les sahrouis"

Intervention de M. Hans-Christian Stroebele, vice président du groupe  Les Verts, au Bundestag, le 27 janvier 2011
Les deux motions soumises évoquent les chicanes et les violations des droits de l’homme par les autorités marocaines au Sahara occidental Elles font état de la situation insupportable dans laquelle se trouve une grande partie du peuple sahraoui depuis des décennies et elles font remarquer que l’état marocain refuse constamment d´appliquer la résolution 690 qui date de 1991. 
Depuis les années 70, je suis attentivement la lutte du Frente Polisario pour la liberté, à l’époque contre la colonisation espagnole. Nous avons essayé de soutenir cette lutte de manière solidaire. Comme député au Bundestag, je m’occupe de la situation très difficile (désespérée) des Sahraouis et du problème non résolu du statu politique et juridique du Sahara Occidental. La répression par l’état marocain a augmenté constamment, tout comme l’impatience et le mécontentement des sahraouis s’accentuent.
Je me suis rendu au Sahara occidental. Il y a un mur de protection infranchissable qui divise le Sahara Occidental. Les 140.000 réfugiés qui y habitent dans les camps de réfugiés Sahraouis ne peuvent pas se rendre au Sahara Occidental. Les visiteurs des camps  ne peuvent pas y aller. J’aurais du prendre un vol sur plusieurs milles de km, en passant par Alger, pour me rendre dans les camps des réfugiés. Je suis en contact permanent avec le représentant du Polisario. Je me suis solidarisé avec l’activiste des droits de l’homme Haidar quand elle avait fait la grève de la faim pour plus de 30 jours à Lanzarote car le Maroc lui avait refusé de rentrer dans sa patrie le Sahara Occidental. Je sais que le Polisario à suspendu  la lutte armée en 1991 pour annoncer un cessez le feu car, à l’époque, l’ONU avait présenté un plan de la paix qui avait promis au peuple Sahraoui de pouvoir décider dans le cadre d’un référendum s’il souhaitait un état propre ou bien obtenir un statu autonome dans l’état marocain. Cette promesse a été confirmée par le Conseil de Sécurité de l´ONU dans sa  résolution 690.
Maintenant, cela fait 20 ans que les sahraouis attendent que cette promesse de la communauté internationale soit tenue. Le Maroc refuse déjà de parler sérieusement de ce référendum. Les sahraouis sont furieux et déçus, aussi de l´ONU et du Conseil de Sécurité. Ils se sentent abandonnés par la communauté internationale, par l’ONU, par l’UE et par les gouvernements des pays européens et ce, à juste titre. J’en ai également parlé aux représentants marocains, non seulement avec l’ambassadeur á Berlin mais aussi avec des marocains au Maroc. Par conséquent, je sais qu’il est devenu très difficile de solutionner le problème. Le fait d’avoir attendu trop longtemps pour la mise en application des résolutions des nations Unies a nuit beaucoup au développement des choses.
Une grande partie de la population marocaine considère dorénavant que le Sahara Occidental fait partie intégrante de leur pays. Cela ne vaut pas seulement pour le roi ou pour le gouvernement. Déjà en 1975, le roi avait envoyé 350.000 colons marocains au Sahara Occidental. Plus d’un quart de siècle est passé depuis. Beaucoup a changé. Des faits ont été créés. Beaucoup de marocains vivent désormais au Sahara Occidental ce qui pose problème au niveau de l´identification des personnes ayant le droit de vote lors du référendum.
L’appartenance du Sahara Occidental au Maroc a été élevée au rang de question nationale. Déjà à l’école les enfants apprennent qu’il fait partie du Maroc. Un représentant assez libéral du gouvernement marocain m’a dit qu’aucun gouvernement marocain ne serait en mesure d’accepté la séparation du Sahara Occidental du Maroc sans perdre son pouvoir. La propagande est omniprésente. Très souvent, j’ai constaté que cette idéalisation de la question du Sahara Occidental a été reprise dans les médias, par le public et par la population du Maroc. Voilà ce qui rend si difficile de trouver une solution raisonnable. Aucun Premier ministre ne veut négocier une solution qui causera sa chute. Or, cela ne veut pas dire qu’il faut récompenser le fait que l’on a fait traîner le référendum juste parce que sa mise en place est devenue encore plus difficile. Et surtout, cela ne justifie en aucun cas l’expulsion des 160.000 sahraouis de camps situés au Sahara ni la violence contre 15.000 personnes dans le camp de tentes prés de El Aaiun ni la mort de Nayem El-Garhi, âgé de 14 ans, ni l’arrestation arbitraire de sahraouis par les forces de l’ordre marocaines ni la limitation de la liberté des médias ni les violations fréquentes des droits de l’homme. Ainsi, le Maroc ne sauvegarde pas vraiment ses intérêts que nous connaissons tous car il met ainsi en jeu son prestige international. La multiplication des interdictions, la répression et les violences sont des réactions erronées aux aspirations des sahraouis  pour obtenir la liberté et l’indépendance.
Voilà pourquoi, nous demandons au gouvernement marocain : Ouvrez le mur de protection entre les camps de réfugiés et le reste du pays. Ce mur aussi doit tomber. Tous les sahraouis, tous les journalistes, toutes les organisations humanitaires, tous les observateurs internationaux et tous les députés doivent avoir libre accès au Sahara Occidental et pouvoir y bouger librement. Les prisons et les procédures pénales doivent respecter les standards internationaux. La liberté d’opinion et de presse doit être respectée au Sahara Occidental aussi et également en ce qui concerne les réfugiés. Répondre à ces attentes va de soi et ce serait aussi dans l’intérêt du Maroc. Ce serait une contribution judicieuse pour la désescalade. Le gouvernement fédéral doit orienter les relations germano-marocaines sur la réponse que le Maroc donne à cette demande.
Le prestige et la crédibilité de l’ONU ainsi que de la communauté internationale souffrent du fait que ses résolutions sont pratiquement abrogées par le désœuvrement  et le non-respect sur plusieurs années et si les droits de l’homme sont violés au lieu de les mettre en place. Pour cette raison, il appartient à l’ONU d’assumer sa responsabilité et de faire enquêter  par un comité international les incidents  des derniers mois, les décès,  la disparition de personnes et de surveiller le respect des droits de l’homme et de jouer un rôle constructif pour solutionner le conflit. Cela signifie, qu’il faut entamer des entretiens et des négociations pour arriver à une solution politiquement acceptable par tous qui soit juste et durable. Comme membre du conseil de sécurité, le gouvernement fédéral doit prendre les devants. Les ressources halieutiques, très riches dans le passé, et les gisements de pétrole devant la cote du Sahara Occidental ne doivent devenir de malédiction mais devront représenter une opportunité pour la population souffrante des sahraouis et ils pourraient même constituer la solution. Le Maroc pourrait en profiter aussi.
Le conflit lié au Sahara Occidental doit rester à l’ordre du jour jusqu’à ce qu’il soit surmonté.

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