Des années après la Marche Verte, lancée au Sahara Occidental en 1975, un problème se pose. Il s’agit de revendications socioéconomiques, ainsi que de questions politiques. En même temps, un nouveau front d’inquiétude au sujet de l’activité d’Al Qaida recouvre la zone. Le Maroc se braque encore et toujours face au processus de paix sous le parapluie de l’ONU sans réussir, par ailleurs, à satisfaire les demandes de la population. Le démantèlement par les forces policières marocaines du camp de sahraouis de Gdaim izik, non loin d’El Aaioun, le 8 novembre, a mis en évidence la violence dans la région.
La dispute entre l’Algérie et le Maroc, avec leur frontière fermée, se trouve en arrière-plan. Les deux parties confrontées, le Maroc et le Polisario, parlent de la responsabilité espagnole, française, d’une aide possible des USA. Mais on oublie l’appui répété de l’administration américaine, par exemple la dernière ronde de conversations entre Marocains et Sahraouis, à New York.
Une voix, proche de l’Algérie et du Polisario, a avancé la possibilité d’une zone d’environ 10 000 km² reconnue comme sahraouie : proche de l’Atlantique mais sans côte. Dotée cependant de nappes phréatiques suffisantes pour garantir le développement agricole.
Il y a des dizaines d’ethnies sur les 2 000 kilomètres de côte qui séparent le nord du Maroc de la Mauritanie. Il faut ensuite parcourir 800 kilomètres pour arriver au Sénégal. Le Maroc soutient que le passage continuel de ses caravanes le long de cette côte fut une façon de peupler le territoire. Depuis le XIXème siècle, le Maroc tente d’absorber l’ancien Sahara espagnol. Après la guerre hispano-marocaine de 1860, l’Espagne avait réussi à inclure dans le traité de paix un article qui cherchait à protéger l’archipel des Canaries : après un premier déploiement dans les années 1880, de nouvelles forces espagnoles débarquèrent en 1930 pour y rester. Quatre décennies plus tard, l’Espagne se retirait. L’agonie du général Franco, patiemment attendue par Hassan II, accéléra la sortie espagnole. C’est ainsi que la Marche Verte vit le jour en 1975. En pleine ouverture démocratique, l’Espagne préféra éviter un conflit territorial, difficile à justifier devant l’ONU. Peut-être que l’Espagne commit une erreur en abandonnant unilatéralement le Sahara, mais peut-être elle fut adroite en arrivant à un accord avec le Maroc au sujet du retrait. La déclaration du 14 novembre 1975, six jours avant la mort de Franco, formalisait la sortie espagnole, bien qu’elle ne lui octroyait pas de légitimité.
Le Maroc administre de facto presque tout le territoire utile de l’ancienne colonie. La République arabe sahraouie démocratique (RASD) n’a pas été reconnue par l’ONU ni par aucun des cinq membres permanents du Conseil de sécurité. De même, ni l’ONU ni aucun État n’ont reconnu la souveraineté marocaine. La RASD a été reconnue par 81 États, mais la présence du Maroc dans le Sahara Occidental compte sur l’appui oscillant de la Ligue arabe et 25 États. Aujourd’hui, le Sahara Occidental est toujours un territoire non autonome. Les efforts de James Baker, envoyé de l’ONU en 1997, n’ont pas abouti. Baker obtint un recensement valide de l’ancienne colonie, que le Maroc ne reconnut pas. Le Maroc tente aujourd’hui de faire en sorte que son plan d’autonomie dote de légitimité juridique une réalité que le dur langage des faits a déjà démontrée, le contrôle de 80 % du territoire, 200 000 km², dont toute la côte.
L’origine de l’affrontement à El Aaioun se trouve, en partie, dans le traitement économique différent dont font l’objet les Sahraouis fidèles et les Sahraouis étrangers au Maroc, nomades entre Tindouf et la zone d’Adrar Soutouf au sud. Les anciennes consignations abonnées par le Maroc aux nomades ont brusquement été coupées. Nombre de ces Sahraouis, sans relation avec le Polisario, ont réclamé. Le camp de protestation établi aux environs d’El Aaioun a entamé des négociations avec les autorités marocaines pendant des semaines avant la rupture le 6 novembre. Le Maroc a expliqué que 11 gendarmes et deux sahraouis sont morts lors du démantèlement sans armes à feu par les forces marocaines. Human Rights Watch a dénoncé les restrictions à l’information. Une résolution du Parlement européen a demandé une enquête sur la situation des droits de l’Homme dans le territoire. Au-delà des doutes, l’on demande aux parties d’avancer dans les négociations pour atteindre une résolution juste du conflit.
Afkar/Ideas, Décembre 2010
Soyez le premier à commenter