Bouteflika à un sénateur américain «Le Maroc doit traiter l’Algérie de manière sérieuse»

Le Maroc aurait tout à gagner si sa frontière avec l’Algérie venait à être rouverte, nous apprend un câble diplomatique révélé par WikiLeaks, publié sur le site internet d’El Pais.

Et pour cause, «les régions nord-est de ce pays dépendent des échanges commerciaux avec l’Oranie», déclare le président Abdelaziz Bouteflika à Richard Lugar, président de la commission des affaires étrangères au Sénat américain.

La rencontre a eu lieu le 18 août 2005 et les deux hommes ont abordé le dossier du Sahara occidental ainsi que les relations algéro-marocaines, plus tumultueuses que jamais. Pourtant, même si les relations officielles sont au plus bas, les échanges entre les populations frontalières n’ont jamais vraiment cessé.

«Même avec cette fermeture, le Maroc engrange annuellement trois milliards d’euros, et ce, grâce à la contrebande», confie Bouteflika. Et si c’est le Président qui l’affirme, l’on ne peut que le croire, puisqu’il insiste auprès de son interlocuteur sur le fait qu’il soit né au Maroc et qu’il connaît parfaitement ce pays. Les deux «frères ennemis» ont ainsi des «raisons et des intérêts objectifs à instaurer de meilleures relations», reconnaît-il. Mais pas à n’importe quel prix. «Si les Marocains veulent discuter d’une normalisation des relations avec nous, ils sont dans l’obligation de traiter l’Algérie de manière sérieuse», objecte toutefois Bouteflika. Car le Président fulmine encore contre le roi Mohammed VI et ne peut accepter ses «comportements infantiles».

Et si certains hommes politiques, comme Chirac ou Bush, lui ont fait remarquer que le roi n’était qu’un jeune enfant et que lui était un vétéran rompu à la diplomatie, le Président réplique  «Je ne suis pas Jésus-Christ et je ne tendrai pas l’autre joue.» Nostalgique de Baker et de son plan «qui représentent toutes les valeurs américaines que l’on admire», Bouteflika affirme à ses invités américains que l’Algérie accepterait les résultats d’un référendum, quels qu’ils soient. Ce qui ne signifie pas «fermer les yeux sur les entourloupes marocaines». «Le référendum est une boîte de Pandore», mais l’Algérie défendra jusqu’au bout le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination, «même si nous devions être le dernier pays membre de l’ONU à le faire», souligne le Président.

Ghania Lassal
El Watan, 22/12/2010

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