Résolution 1514 : La conférence d'Alger relance le débat

La grande salle des conférences et les travées du palais des Nations ont résonné hier, en l’espace de quelques heures, au chant engagé de l’ex-président Kenneth Kaunda et vécu l’ambiance révolutionnaire des années 1970 lorsque l’Algérie était à l’avant-garde des pays non-alignés.

Une pléiade de personnalités mondiales et nationales qui ont contribué à l’indépendance de leur pays a répondu présent à cette conférence internationale dédiée au 50e anniversaire de la résolution onusienne1514 du 14 décembre 1960, permettant, quelques années plus tard, d’accélérer le mouvement d’indépendance de plus de 80 pays, dont l’Algérie en 1962. En outre, deux anciens présidents, Ahmed Ben Bella, et Kenneth Kaunda, le doyen des pères fondateurs de l’Afrique, étaient présents à cette rencontre. Ils étaient assis au côté de l’ancien président sud-africain, le successeur de Nelson Mandela, Thabo M’beki, du Nigérian Olusegun Obasanjo, d’Omar Konaré, du président du Sahara occidental, Mohamed Abdelaziz, des enfants de Patrice Lumumba, Frantz Fanon et N’Krumah, du prix Nobel de la paix, la Brésilienne Rigoberta Menchu, de Me Verges, d’Abdelhamid Mehri, de Rédha Malek, de Lakhdar Ibrahimi… Le représentant de l’Algérie, le ministre d’Etat et représentant personnel du président Bouteflika, Abdelaziz Belkhadem, a souligné que le colonialisme a été «une entreprise systématique d’oppression et de destruction de nos sociétés, de déni de notre personnalité et de spoliation de nos richesses».

Selon le ministre, «cet asservissement a conduit les peuples colonisés à développer diverses formes de résistance pour le recouvrement de leur liberté et de leur dignité». «Cela a été le cas pour le peuple algérien qui a connu l’une des formes les plus féroces d’oppression coloniale sans jamais cesser de lui résister et sans se résigner au fait colonial», ajoute-t-il. «La Révolution du 1er Novembre 1954 a fait de l’Algérie combattante un acteur essentiel dans le mouvement historique de libération des peuples», a-t-il poursuivi. Evoquant la résolution onusienne de 1960, Belkhadem a rappelé que celle-ci a, à travers sa résonnance mondiale, «contribué à l’éveil de la conscience universelle et à la dénonciation des méfaits du colonialisme». Le représentant du président Bouteflika a ensuite indiqué que ce «droit s’applique en particulier au peuple palestinien et celui du Sahara occidental qui sont en droit d’attendre de la communauté internationale un soutien plus ferme et une action plus résolue en vue de l’exercice de leur droit à disposer librement d’eux-mêmes». Pierre Galant, le représentant de la société civile qui fut le premier à prendre la parole, a d’emblée placé cette rencontre dans son cadre historique en affirmant que le XXe siècle «restera dans l’histoire comme étant une période des plus sanglantes dans la nature humaine, à travers les génocides de masse de l’humanité». Mais le combat libérateur du Vietnam et le déclenchement de la guerre de l’Algérie ont, selon l’orateur, «sonné le glas» de l’impérialisme. «Aujourd’hui, les firmes internationales pillent les richesses de pays encore colonisés comme le Sahara occidental et la Palestine, et, de ce fait, sont considérés comme complices du Maroc et d’Israël», ajoute-t-il. Il a lancé un appel à la communauté internationale pour mettre au banc des accusés la Grande-Bretagne et l’Espagne, et s’atteler à hâter la libération du Sahara occidental et de la Palestine. Tour à tour, Amr Moussa, SG de la Ligue arabe, Jean Ping, président de la commission de l’Union africaine, Kenneth Kaunda, Thabo Mbeki et Obasanjo, Mme Nguyen Thi Binh, présidente de la conférence et ex vice-présidente du Vietnam, et Tayé-Brook Zerihoun, sous-secrétaire général aux affaires politiques à l’ONU et représentant de Ban-Ki-moon, ont mis en exergue le rôle joué par cette résolution dans l’indépendance des pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine.


Selon Jean Ping, l’impact de la guerre d’Algérie a ouvert une large brèche pour beaucoup de pays africains qui, en cinquante années d’existence, «a permis de réaliser des progrès immenses dans le parachèvement de la libération des peuples africains». «Mais ce processus reste à achever, avertit-il, puisque la Palestine et le Sahara occidental demeurent parmi les 16 pays encore colonisés. Ce dernier pays attend l’organisation d’un référendum pour choisir librement son avenir.» La représentante du Vietnam soutient, quant à elle, qu’«il reste un long chemin pour parachever le processus d’indépendance». 

Pour elle, l’ONU assume une «grande responsabilité» dans le cas des 16 pays encore colonisés. Aussi suggère-t-elle qu’«une nouvelle lutte (doit) nécessiter une coopération et une solidarité étroites de tous les pays». Après les discours d’ouverture, les travaux de la rencontre se sont poursuivis tout l’après-midi au sein des trois ateliers. La seconde journée sera consacrée à la lecture de la déclaration d’Alger. Le ministre délégué aux Affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel, animera ensuite une conférence de presse en présence de plus de 80 journalistes étrangers invités à cette rencontre. 
Mahmoud Tadjer
Le Jeune Indépendant, 13/12/2010

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