Le complot du roi

Il n’y a pas meilleur alibi pour l’armée du roi qui massacre, à huis clos, des innocents pour légitimer sa présence coloniale sur le sol du Sahara occidental.

Le Palais royal est en train de faire un amalgame dangereux. Il consiste à faire croire que les combattants sahraouis qui luttent contre une armée coloniale ont des liens avec Al Qaîda. C’est donc un plan diabolique qui fait le lien entre la lutte légitime du Front Polisario et les crimes sans nom commis par Al Qaîda. Le Maroc insiste sur le fait que le mouvement du Polisario, qui ne fait que défendre son territoire, tisse des liens avec Al Qaîda. Il n’y a pas meilleur alibi pour l’armée du roi qui massacre, à huis clos, des innocents pour légitimer sa présence coloniale sur le sol du Sahara occidental. 

Le Royaume engagera-t-il sa crédibilité déjà altérée en impliquant de force quelques prisonniers du Polisario dans le terrorisme? C’est ce que n’écartent pas nos sources sécuritaires. Depuis la mi-septembre, date à laquelle ce qu’on appelle Al Qaîda au Maghreb islamique kidnappe sept employés de la société Areva dont cinq ressortissants français, le contexte sécuritaire reprend le dessus dans l’actualité internationale. Elle est indéchiffrable au Pakistan où l’on enregistre chaque jour un attentat occasionnant des centaines de morts, au Yémen où la situation est au bord de l’explosion, notamment depuis cet épisode des colis piégés qui n’a pas encore livré tous ses secrets. 

La tension est à son comble en Turquie secouée par des attentats revendiqués par des séparatistes kurdes. La situation est encore plus complexe en Irak avec une impressionnante montée de la violence au moment même où, au Sahel, la confusion prime et brouille toutes les visions. Il serait pratiquement absurde de dissocier tous ces événements. En fait, ce ne sont que les pièces d’un même puzzle. Justement dans cette confusion, le président français, Nicolas Sarkozy, intervient pour dire que la société Areva sera financièrement soutenue puisque, et il le cite, c’est l’une des plus importantes entreprises françaises.


Quand le président français affiche publiquement son soutien à une compagnie française, cela ne constitue pas un événement banal. Il faut surtout savoir que cette compagnie se trouve au centre du dernier enlèvement commis par Al Qaîda au Sahel. Selon des observateurs avertis, le dossier de l’uranium à Arlit demeurera la chasse gardée de la France. Pendant ce temps, les Américains parlent d’une éventuelle intervention militaire mais qui serait le dernier recours et sauf si la situation l’exige.


A priori, c’est ce qui pourrait se produire puisque de son côté le chef du réseau d’Al Qaîda, Oussama Ben Laden, désigne un nouveau chef pour diriger les opérations subversives dans le monde. Il s’agit d’un certain Seif Eladel, d’origine égyptienne, l’un des principaux auteurs des colis piégés dont l’un destiné au président français.


Le plan du Pentagone sera mis à jour et appliqué au Sahel pour contrecarrer les projets d’Al Qaîda, même si les Américains partagent l’avis de l’Algérie qui refuse la présence d’une armée étrangère dans cette région. Néanmoins, des sources sécuritaires très au fait de la situation confient que les Américains comptent vraiment s’installer dans la région.


Mais ils sont conscients qu’en ouvrant un nouveau front de lutte contre Al Qaîda, ils vont transformer, malgré eux, des terroristes en véritables combattants pour la liberté. Cette hypothèse défendue par l’Algérie est sérieusement prise en compte par Washington, selon nos sources. C’est ce qui explique cette relative prudence, pour le moment, par certains responsables américains. Ce n’est pas le cas des Français. Ces derniers ont bien imposé la présence marocaine lors d’une rencontre sécuritaire le mois dernier au Sahel, sachant que ce pays n’a aucun lien avec la région. En soutenant officiellement les positions marocaines au Sahara occidental, la France n’est pas sans ignorer qu’elle appuie le plan marocain visant à accroire que les combattants sahraouis sont en accointance avec Al Qaîda. Un véritable plan royal.
Ikram GHIOUA
L’Expression, 13/111/2010

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