Huis clos

Le bureau d’Al Jazeera au Maroc n’est plus fonctionnel depuis quelques jours en raison de son traitement du conflit du Sahara occidental, jugé «non professionnel» par les autorités marocaines. Bien que le responsable du bureau affirme, quant à lui, le contraire et que la couverture de ce conflit a toujours été impartiale. On le devine, ceux qui animaient ce bureau ne pouvaient que s’y confirmer en ayant eu, au préalable, instruction de ce que devaient être «les lignes rouges» à ne pas franchir. Mais cela n’était apparemment pas suffisant. 
 
La décision du royaume de fermer le bureau participe à cette entreprise de «gérer» dans la plus grande opacité et obstruction le sensible dossier inhérent à «l’intégralité du territoire», comme il aime à l’appeler. C’est que le Maroc a imposé un huis clos qui ne dit pas son nom sur tout ce qui se déroule à l’intérieur des territoires occupés, notamment s’agissant des multiples cas de violation des droits de l’Homme. Médias, parlementaires, organisations non gouvernementales (ONG), associations, militants des droits de l’Homme… étrangers en sont tenus éloignés pour ne pas dévoiler les pratiques condamnables du Makhzen à l’égard des populations sahraouies. 
 
Lorsque les parties, qui sollicitent une autorisation du royaume pour visiter les lieux, ne se voient pas opposer une fin de non-recevoir formelle à leur requête, elles sont destinataires d’arguments aussi fallacieux que superflus pour justifier leur refus. Dans d’autres cas, elles sont mises face à des entraves administratives et bureaucratiques dissuasives qui servent, en réalité, à masquer une volonté préalable des autorités marocaines de ne point coopérer. Tout comme les territoires occupés au Proche-Orient, ceux du Sahara occidental sont devenus un espace de non-droit eu égard à tout ce qui s’y pratique comme dépassements déplorables. L’illustration extrême en a été donnée il y a quelques jours avec le meurtre du jeune adolescent de 14 ans, arraché à la vie par des balles des services de sécurité marocains, près d’El Ayoun occupée. Un cas qui, hélas, est loin d’être isolé. 
 
Si tous les Sahraouis des territoires occupés sont acquis à la thèse du royaume, qui est celle de l’autonomie du Sahara occidental comme ce dernier le prétend avec outrance, qu’est-ce qui empêcherait le Maroc de laisser les médias, parlementaires et autres organisations d’y accomplir les missions qui les intéressent ? On se souvient de tout le mal qu’avait eu le Haut-Commissariat aux droits de l’Homme relevant de l’ONU pour s’y rendre en 2007 afin d’établir son rapport sur la situation des droits de l’Homme. Idem pour la publication dudit rapport qui a mis du temps à être dépoussiéré en raison de pressions exercées sur ses membres par le Maroc, avait alors accusé le Front Polisario. 
 
Outre les atteintes physiques et morales faites aux Sahraouis, le Maroc veut également s’adonner à une exploitation effrénée des ressources halieutiques des territoires sahraouis sans témoin et également dans le déni le plus total des droits de l’Homme. Le Maroc n’ayant eu de cesse d’ignorer les multiples appels du gouvernement sahraoui pour que cesse cette autre injustice. De même que les positions de certains pays occidentaux (nordiques notamment) ou compagnies ayant décidé de rompre les contrats de pêche qui les liaient au Maroc. Ces résiliations ayant valeur d’un fort message adressé au royaume quant aux multiples violations qu’il applique sur un territoire qui n’est pas, en définitive, le sien.
Par Mekioussa Chekir
La Tribune d’Algérie, 2/11/2010

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*