NÉGOCIATIONS MAROC – FRONT POLISARIO
Le chef de la diplomatie algérienne dénonce les contrariétés infligées à la tournée de Christopher Ross par les autorités marocaines.
Le pouvoir marocain devra assumer seul l’éventuel et même probable, échec des négociations qui auront lieu, en principe, entre le 3 et le 5 novembre 2010 à New York. Le Makhzen ne s’est, en effet, aucunement gêné pour entraver le nouveau souffle que veut imprégner l’envoyé spécial des Nations unies au conflit du Sahara occidental. «Cette dynamique est contrariée par la position de l’une des parties, en l’occurrence le Maroc, qui bloque les négociations sur toute solution autre que la sienne et qui ne veut pas entrer en matière de l’autre solution qui est celle du référendum d’autodétermination», a fait remarquer Mourad Medelci, qui s’est exprimé jeudi sur les ondes de la Radio Chaîne III.
L’intervention du ministre algérien des Affaires étrangères ne pouvait pas mieux tomber. «Le gouvernement est profondément conscient que la situation anachronique dans les camps de Tindouf est liée, en fait, au refus de l’Algérie, en tant que pays d’accueil des populations des camps, de permettre au Haut Commissariat de l’ONU aux réfugiés d’effectuer le recensement et l’enregistrement des populations des camps et de procéder à l’interview individuelle conformément à son mandat et en réponse à l’appel, sans équivoque, du secrétaire général de l’ONU dans son dernier rapport au Conseil de sécurité en avril 2010», déclarait, le jour même de la visite du représentant personnel du secrétaire de l’Organisation des Nations unies aux camps de réfugiés sahraouis de Tindouf, le ministre marocain des Affaires étrangères et de la Coopération, dans une dépêche répercutée par l’agence MAP datée du 20 octobre 2010.
La fin du calvaire des réfugiés sahraouis, qui n’est que la conséquence de l’annexion de leurs territoires par les forces d’occupation marocaines, tient à une seule initiative: l’organisation d’un référendum d’autodétermination qui leur assurerait le droit à se prononcer pour leur indépendance.
Pour mieux afficher son mépris et sa mauvaise foi, le gouvernement marocain n’hésite pas un seul instant à remettre en cause la légitimité du Front Polisario, à parler au nom du peuple sahraoui, tout en n’ignorant pas qu’il sera son interlocuteur direct durant les prochaines négociations comme il le fut d’ailleurs auparavant. Les festivités commémoratives du 35e anniversaire de la Déclaration de l’union du peuple sahraoui semblent lui être restées en travers de la gorge.
«Une cérémonie improvisée le 12 octobre courant pour célébrer le soi-disant anniversaire de la proclamation de l’Unité nationale, prétendant que le Polisario parle au nom de tous les habitants originaires de nos provinces du Sud et qu’ils n’ont aucun lien avec le Royaume du Maroc, qui est en fait, comme tout le monde le sait, leur mère patrie passée, présente et future». C’est ainsi que l’événement a été commenté par le chef de la diplomatie marocaine qui n’a pas omis de faire mention d’un possible «retour à la guerre», prôné par les responsables politiques sahraouis. Des moyens de lutte qui sont qualifiés de «méthodes abjectes» par le ministre marocain des Affaires étrangères. Le gouvernement de Mohammed VI «réaffirme sa détermination à continuer de traiter ce dossier national crucial à l’échelon de l’ONU, avec sérénité, fermeté et responsabilité», a ajouté Taïeb Fassi Fihri.
Le ton est donné! Quelle place reste-t-il dans de telles conditions à des négociations sans conditions et de bonne foi? Christopher Ross veut y croire. «J’espère que cette tournée puisse donner lieu à des avancées concrètes sur la voie du règlement du conflit du Sahara occidental, conformément aux recommandations onusiennes et des appels de la communauté internationale», a déclaré l’envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU aux journalistes, à l’issue de sa visite dans les camps de réfugiés sahraouis.
Le Front Polisario est décidé à l’appuyer. «Nous exprimons notre confiance et notre soutien aux efforts de Ross pour la mise en application des résolutions des Nations unies, appelant au droit du peuple sahraoui à l’autodétermination», a indiqué M’hamed Khadad le chargé du référendum. L’Algérie de son côté affiche toute sa quiétude dans ce conflit qui oppose le Maroc et le Front Polisario. «Nous avons en Algérie une situation de très grande sérénité sur cette question-là, parce que nous défendons les Sahraouis comme nous avions défendu, par principe, il y a plusieurs années, Timor-Leste», a tenu à souligner Mourad Medelci. La balle est désormais dans le camp marocain.
Mohamed TOUATI
L’Expression, 23/10/2010
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