Le comble dune campagne médiatique cest de finir par croire quelle nen est pas une. Au lieu dintoxiquer la partie contre laquelle elle est dirigée, elle sintoxique elle-même. Lexemple le plus fameux nous a été donné par lEgypte, lorsque pendant des semaines et des mois, en juin 1967, elle a fait croire au monde entier et à son opinion interne, à travers les discours de ses propres dirigeants et medias, quelle allait vers une guerre certaine avec Israël alors quelle en était aux antipodes. Et lorsque Israël a attaqué, la surprise fut à ce point générale que, dans les 48 heures qui suivaient, laviation égyptienne était totalement détruite au sol et le Sinaï déjà sous occupation.
Aujourdhui, avec le Maroc, on peut se demander si nos voisins ne sont pas dupes de leur propre campagne contre lAlgérie, via le Polisario, ou plus directement encore. Certes, vu de lextérieur, lAlgérie paraît empêtrée dans les problèmes : terrorisme, problèmes sociaux, corruption, repli économique, notamment du fait de la loi de finances, inflation etc. Sur le plan géopolitique, les tensions paraissent énormes aussi bien avec la France, que lEgypte ou les pays du Sahel. En un mot, peu de pays nous portent dans leur coeur. On peut donc penser que lAlgérie est en crise et de plus en plus isolée. Surtout que rien ou presque ne vient démentir cette hypothèse : ni la timidité,voire la maladresse, avec laquelle les dirigeants «communiquent», ni, surtout, la presse nationale (disons la plus crédible médiatiquement parlant) dont personne ne peut imaginer, au Maroc par exemple, quelle soit en campagne permanente contre le pouvoir établi. En ce sens, et heureu-sement dailleurs, quil est de bon ton ici de tout critiquer.
Tout cela donne donc le sentiment du pire. En songeant à porter lestocade, avec leurs relatifs dérisoires moyens, les Marocains peuvent avoir été abusés dabord par des éléments objectifs dune situation donnée, puis par ce que donnent à penser deux-mêmes les Algériens, dont le tempérament nihiliste nest pas toujours perçu à sa juste mesure par autrui, et enfin par les gouvernants marocains à leur tour qui confondent probablement leur nombril avec celui de lunivers. Le fait est quà force de sagiter ils vont finir par se calmer, à moins de disposer de ressources inépuisables dans le domaine de lagitation. Un jour ou lautre, ils comprendront alors que le règlement du problème quils ont posé au Sahara occidental passera par le jeu des grandes puissances, aussi bien les Etats-Unis que la France. Et que ces grandes puissances qui ont des opinions internes, autrement moins sujettes à la manipulation que les nôtres, et en tout cas moins «agitables», finiront bien par agencer leurs intérêts à la marche de lHistoire. LAlgérie mise de côté pour ce quelle est et ce quelle nest pas, le problème du Sahara occidental ressemble à celui de la Palestine, toute proportion gardée. Cest la résistance à linjustice, et non une campagne médiatique donnée, qui en constitue la solution.
Brahim Djalil
Le Jour d’Algérie, 14/10/2010
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