Mijek (Territoires libérés du Sahara occidental).
De notre envoyé spécial
Le Premier ministre sahraoui, Abdelkader Taleb Omar, qui a présidé les festivités, en labsence du président Abdelaziz en déplacement au Nigeria, a en tout cas clarifié certains enjeux et pris son peuple et la communauté internationale à témoins.
Son message ? La République sahraouie indépendante nest et ne sera jamais un repaire pour les terroristes dAl Qaîda et encore moins une zone de transit pour limmigration clandestine et le trafic de drogue. La mise au point est aussi claire que lont été les accusations marocaines. Le Premier ministre sahraoui avait à cSur de préciser, hier, devant un bataillon de 1200 soldats de la 3e région militaire, que la République sahraouie est soucieuse, au même titre que tous les pays du Maghreb et du Sahel, de lutter contre les fléaux menaçant la stabilité de la région. La preuve ? Le choix de Mijek située à seulement 18 km de la frontière mauritanienne plaque tournante du trafic en tout genre, de la contrebande et de limmigration clandestine est décliné comme un symbole de lengagement de la RASD à assumer sa part de responsabilité dans la lutte contre ces facteurs qui constituent de potentielles sources de crise dans toute la région. Le geste se veut être, à la fois, un engagement vis-à-vis des pays occidentaux et un défi à la propagande marocaine qui tend à présenter les Sahraouis comme des alliés objectifs dAl Qaîda.
Or le Premier ministre sahraoui a inversé complètement lhypothèse en faisant remarquer que le non-règlement du conflit conformément à la légalité internationale est précisément un risque majeur pour la stabilité. «La persistance du conflit retarde forcément la coopération entre les pays du Maghreb dans la lutte contre des fléaux transnationaux, comme la drogue, le terrorisme, et limmigration clandestine», at-il mis déclaré.
Mais pas seulement, puisque «désormais, même les intérêts vitaux des pays européens et du monde sont sérieusement menacés», assènera encore Abdelkader Taleb Omar. Au plan régional, le Premier ministre sahraoui sest fait fort daffirmer que «la politique dexpansion marocaine constitue un frein à la construction maghrébine et sape les liens entre les peuples».
Cest pourquoi, il a appelé lEspagne à assumer sa «responsabilité historique» dans le processus de décolonisation du Sahara et la France à Suvrer au «respect du droit international et des droits de lhomme au Sahara occidental au lieu de saborder les initiatives de ce genre».
Démonstration de force
A lONU, le Premier ministre sahraoui lui demande «denclencher une dynamique politique pour régler le conflit». Parce que, le peuple sahraoui, a-t-il observé, nentend pas rester les bras croisés et se lamenter sur son sort. «Il faut éviter lirréparable», tonne Abdelkader Taleb Omar dans un message subliminal à une possible reprise des armes, si daventure lautodétermination devenait illusoire dans le cadre de la légalité internationale. Et cette mise en garde aura été le clou de cette démonstration de force hier à Mijek, façon de dire au monde que le peuple sahraoui et son représentant, le Polisario, savent respecter le droit international et la négociation, mais savent également manipuler les armes sils y sont obligés.
Cest, en effet, devant une foule nombreuse et survoltée que les différentes unités du bataillon de la 3e région militaire ont paradé sous le regard fier et solennel du Premier ministre de la RASD qui a procédé à la revue des effectifs, debout à bord dune jeep de lArmée de libération populaire sahraouie (ALPS). Le commandant en chef de la 3e région militaire, Hamdi Khalil Miara, a annoncé la couleur, dans son allocution, en soulignant que «ses troupes étaient prêtes».
Lui aussi a insisté sur le fait que les unités de lALPS luttent sur plusieurs fronts, notamment le trafic de drogue et limmigration clandestine, confirmant ainsi les engagements politiques de la RASD.
Il a assuré également que ses troupes entretiennent d«excellents» rapports avec la mission de lONU à Mijek et «respectent» le cessez-le-feu depuis sa proclamation. Jusquà quand encore ? Les milliers de Sahraouis, dont certains sont venus dAmérique latine, qui assistaient hier au défilé sous un soleil de plomb, ne se font, certes, pas dillusions sur le processus politique, mais lont crié bruyamment et sans allusions : «Al Maghrib Barra !» (Maroc dehors !) et «La lilhoukm Edhati, Al Istiqlal Ati» (Non à lautonomie, lindépendance arrivera !).
A cette ferveur militante, le Premier ministre répondra sagement : «Attendons le 13e congrès du Polisario, lannée prochaine, pour décider de ce que nous allons faire.»
El Watan, 13/10/2010
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