Même si ce pays a été la cible d’un attentat terroriste spectaculaire en mars 2004 (à Madrid), perpétré à la Gare d’Atocha, et qui a fait plus de 200 morts et près de 1.400 blessés, l’Espagne continue à «narguer» les pays réfractaires aux versements de rançons contre la libération des otages. Il faut dire à cet égard que c’est l’Etat qui a le plus dépensé pour libérer ses ressortissants retenus par la branche maghrébine d’Al-Qaïda, Aqmi, avec un total de 8 millions d’euros, selon le journal El Mundo, s’appuyant sur les chiffres de Kamel Rezag, conseiller du gouvernement algérien. Elle se place ainsi devant l’Italie qui a versé en mai 2009 près de 4 millions d’euros pour la libération de deux otages détenus par Abou Zeid, chef de la phalange Tariq Ibn Ziyad.
L’Autriche a versé, selon Rezag Kamel, 2.5 millions d’euros. L’Espagne est aujourd’hui considérée comme étant le maillon faible de la guerre contre le terrorisme en général, et Al Qaïda au Maghreb en particulier. Al Qaïda avait, à titre de rappel, revendiqué l’attentat de Madrid, promettant une guerre sans merci contre le gouvernement espagnol. Et au lieu d’agir dans le bon sens, les autorités espagnoles se sont faites «piéger» par le GSPC. Pis, Madrid a finalement cédé aux chantages des groupes terroristes affiliés à Aqmi.
Selon quelques observateurs, l’Espagne a accepté de payer ces 8 millions d’euros à Al Qaïda au Maghreb islamique afin de permettre à cette nébuleuse organisation terroriste de sévir encore plus longtemps dans la région du Sahel. Comment démentir cela alors qu’on connaît bien la position de l’Espagne vis-à-vis du dossier du Sahara occidental. L’Espagne a récemment renforcé ses relations avec Rabat, tout en réduisant celles avec Alger. Des intérêts sont en jeu, Madrid veut renforcer ses liens avec le Maroc, et pour les maintenir, les autorités espagnoles fourniraient des aides financières à Aqmi. Une politique à double tranchant dans la région du Sahel. Madrid veut «taquiner» Alger afin d’avoir plus de gages de la part de ses autorités. Une pression qui sera sûrement appelée à l’échec, d’autant plus que le phénomène du terrorisme ne connaît pas de limite, il peut frapper partout, y compris en Espagne. Par contre, la lutte contre le terrorisme basque est plus que jamais étendue en Espagne. Le gouvernement espagnol a juré de lancer une guerre sans relâche contre les indépendantistes basques de l’ETA. Pourtant, ces indépendantistes n’ont jamais enlevé de civils, ni causé de morts lors des attentats perpétrés ces dix dernières années. Il est vrai que Madrid n’a jamais reconnu le versement de rançon pour obtenir la libération des trois volontaires de l’ONG espagnole Accio Solidaria, enlevés en novembre 2009 en Mauritanie puis retenus par Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) dans le nord du Mali. Contrairement à l’Espagne, la France n’a versé aucune rançon pour la libération de Michel Germaneau, détenu par l’Aqmi, mais qui est décédé en juillet dernier, de même que le Royaume-Uni en ce qui concerne son ressortissant Edwin Dyer qui a été décapité par AQMI en juin 2009, toujours selon le conseiller algérien. Fin août, El Mundo avait affirmé que Madrid avait payé un total estimé à 7 millions d’euros pour obtenir la libération de ses trois ressortissants, tandis que selon des médiateurs maliens, AQMI a reçu «en tout 8 millions d’euros» de Madrid. Le président français Nicolas Sarkozy avait implicitement critiqué l’Espagne, soulignant que le versement de rançons et la libération de détenus d’Aqmi en échange ne sauraient constituer «la seule stratégie» contre cette branche d’Al-Qaïda. Il faut signaler justement qu’un émissaire espagnol est à Alger pour une visite de travail. Il s’agit du secrétaire d’Etat espagnol chargé de l’Amérique latine, Juan Pablo de Laiglesia. La tendance des responsables espagnols en matière de lutte antiterroriste épousera-t-elle celle des algériens…?
Le Carrefour d’Algérie, 19/9/2010
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