Rabat continue de se cacher derrière la question sahraouie

Relations algéro-marocaines : Rabat continue de se cacher derrière la question sahraouie
Au moment où Alger montre une volonté de booster les relations algéro-marocaines, Rabat continue de se cacher derrière la question du Sahara occidental. Et pourtant, le droit d’autonomie pour ce peuple est reconnu par la plus haute institution mondiale, en l’occurrence l’Organisation des Nations unies(ONU).
Depuis quelque temps, l’anniversaire de l’intronisation du roi Mohamed VI est devenu une occasion pour le souverain marocain d’accuser l’Algérie de chercher à torpiller l’initiative d’autonomie marocaine. Des accusations qui interviennent juste après un message en faveur de la normalisation des relations entre les deux pays adressé par le président de la République,     Abdelaziz Bouteflika.  Dans un message qu’il a adressé à l’occasion du 11e anniversaire de l’intronisation du  souverain marocain, il a affirmé  sa ferme détermination de hisser les relations bilatérales. Le président Bouteflika  dira dans son message : «Il m’est agréable au moment où le peuple marocain frère célèbre le 11e anniversaire de votre intronisation, d’adresser à Votre Majesté, au nom de l’Algérie, gouvernement et peuple, et en mon nom personnel, mes vœux les meilleurs, priant Le Tout- Puissant de vous garder et de vous accorder santé et bien-être pour poursuivre votre glorieuse démarche à édifier le Maroc du progrès, de la prospérité et de la gloire». Avant d’écrire :  «Tout en me joignant à vous en cette heureuse occasion, je tiens à réaffirmer ma ferme détermination à hisser les relations bilatérales et à raffermir les liens de fraternité et de bon voisinage qui unissent nos deux peuples frères au service de leur prospérité et progrès». Sachant que l’Algérie qui tient à sa position portant sur le droit d’autonomie du peuple sahraoui, le président Bouteflika n’a à aucun moment évoqué la question du Sahara occidental dans son message. Mais s’agit-il juste d’une initiative protocolaire ou bien est-ce une volonté d’aller vers l’amélioration de la qualité des relations entre les deux pays ? C’est la question que posent plusieurs observateurs qui suivent le processus de cette relation. Un processus jugé «complexe» et dont  les conséquences touchent  toute la région du Maghreb, notamment la construction de l’union du Maghreb uni bloquée depuis 20 ans. En tout cas, durant la dernière réunion du conseil consultatif abrité par l’Algérie il y a quelques mois, les responsables algériens ont insisté sur la relance de la coopération maghrébine, en particulier économique, tout en dépassant les divergences politiques. Mais qui pourra dépasser l’aspect politique et prendre comme modèle l’union européenne pour améliorer les conditions de vie des citoyens maghrébins ? 
Les délires de Mohamed VI
La réponse à cette question n’est pas aussi facile que ça si on revient l’attitude du royaume marocain. Et le discours tenu par Mohamed VI vendredi dernier dans un discours à la nation  à l’occasion de la fête du trône montre que la situation de blocage est toujours d’actualité. En tout cas, le roi marocain n’a pas hésité à accuser l’Algérie «de chercher à torpiller l’initiative d’autonomie marocaine».  Ainsi, la question sahraouie reste un mur de fer que Rabat ne compte pas dépasser et met sur le dos de l’Algérie les conséquences. Mohamed VI accusera l’Algérie d’aller à l’encontre de «la logique historique» dans le dossier du Sahara occidental. Dans ce cadre, il ajoutera que  «le Maroc reste attaché à sa souveraineté sur le Sahara occidental et ne cédera pas un pouce de son Sahara». Selon lui, le Maroc continuera les «efforts de concertation et de coordination avec les Etats maghrébins frères,  en attendant que l’Algérie cesse de contrarier la logique de l’histoire, de la géographie, de la légitimité et de la légalité au sujet du Sahara marocain». Ainsi, Rabat veut apparemment isoler l’Algérie du processus maghrébin en se cachant derrière la question sahraouie.  Dans ce contexte, le roi marocain a affiché son souhait que  l’Algérie  renonce à ce qu’il a appelé «ses manœuvres désespérées visant vainement à torpiller la dynamique enclenchée par notre initiative d’autonomie pour nos provinces du sud ». Une manière pour le souverain marocain de faire allusion au «projet d’autonomie proposé par Rabat au Sahara occidental». Il est à savoir que ce  projet est rejeté  par le Front Polisario qui tient à arracher  un référendum d’autodétermination.
Le gouvernement sahraoui dénonce
Par ailleurs, l’Algérie n’a pas répondu aux «provocations» et « délires» de Rabat,  mais le gouvernement sahraoui a  dénoncé les propos sur le Sahara occidental contenus dans le discours du roi du Maroc.
Dans un communiqué publié samedi dernier  par le ministère sahraoui de l’Information, rapporté par l’Agence de presse sahraouie (SPS), le gouvernement sahraoui a souligné que le discours du roi du Maroc prononcé à l’occasion de la fête du trône concernant le Sahara occidental «ne dénote d’aucune volonté sincère de coopérer de manière constructive en faveur d’une paix durable et définitive conformément à la légalité internationale».
Selon la même source, «le discours du roi du Maroc consacre la politique expansionniste marocaine adoptée depuis plus de 35 ans, à même d’attiser le feu de la guerre et des tensions dans la région». A ce titre, le gouvernement sahraoui a déploré  le fait que cette attitude soit la poursuite de l’intransigeance, du non-respect des résolutions des Nations unies et de la violation de la légalité internationale et des droits de l’Homme».
En outre, il a rappelé que  les résolutions de la légalité internationale «sont claires vis-à-vis de la question du Sahara occidental, dernière colonie en Afrique et dont la solution réside dans l’application du principe d’autodétermination et du respect des frontières héritées du colonialisme». Par ailleurs, le ministère sahraoui de l’Information a appelé le gouvernement marocain à assumer sa responsabilité «quant aux conséquences de cette position». Avant d’inviter  les Nations unies à accélérer sa mission dans la décolonisation du Sahara occidental afin de permettre au peuple sahraoui d’exercer son droit inaliénable à l’autodétermination et à l’indépendance et de faire pression sur le gouvernement marocain pour l’amener «à respecter la légalité internationale et à cesser ses violations des droits de l’Homme au Sahara occidental».
La fermeture de la frontière terrestre pénalise  le Maroc
Il faut dire que le conflit sahraoui reste une carte de  justification utilisée par le Maroc pour rendre plus complexes les relations algéro-marocaines et pourtant, les potentialités d’une coopération fructueuse ne manquent pas entre deux Etats voisins. Mais les messages protocolaires ne sont pas suffisants pour rendre cette relation plus simple et aller vers un développement des relations bilatérales, notamment économiques, sachant que les enjeux de celles-ci sont très importantes. Il est à savoir que Rabat est plus pénalisé que l’Algérie par des pertes économiques  à cause de la  dégradation des relations avec l’Algérie, surtout après la fermeture des frontières terrestres entre les deux pays depuis 2004. Une décision qui est intervenue  à la suite d’un attentat islamiste à Marrakech, que Rabat avait imputé aux services secrets algériens. A ce propos, des  experts affirment que «la fermeture des frontières pénalise plus le Maroc que l’Algérie et représente un manque à gagner annuel qui se chiffre en milliards de dollars pour l’économie marocaine.
Ainsi, le Maroc a toujours montré un acharnement à ouvrir ses frontières surtout que  la situation socioéconomique des Marocains est en dégradation donc il faut bien la justifier  par «la dégradation des  relations avec l’Algérie, notamment sur le plan économique et commercial». A rappeler que l’année dernière,  le roi marocain  avait fustigé ce qu’il a appelé «l’obstination des autorités algériennes à maintenir la fermeture unilatérale des frontières terrestres». Mais Alger  n’a pas répondu à cet appel. Toutefois, l’Algérie a montré sa volonté de booster la coopération économique dans le cadre de l’Union du Maghreb uni.
Par Nacera  Chenafi 
Les Débats, 4/8/2010

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