No man's land ?

Par Tarik Hamza
L’intervention française au Mali, aux côtés des troupes mauritaniennes, puis l’assassinat de l’otage français Michel Germaneau, qui s’en est suivi, ont braqué les projecteurs de l’actualité sur la région du Sahel, un immense territoire qui chevauche entre plusieurs pays. Sans être un no man’s land, loin s’en faut, ce vaste territoire ne manque pas d’attirer les convoitises des puissances étrangères, au vu des richesses qu’il recèle.

Aujourd’hui, on parle de terrorisme et d’El Qaida au Maghreb, et cela justifie tous les dépassements. Dans la réalité, le terrorisme n’est qu’un prétexte et El Qaida est une couverture commode. On a là toute une région où le grand banditisme se livre à toutes sortes de trafics, depuis les cigarettes Marlboro jusqu’au commerce des armes, en passant par la drogue et autres produits.
Alors que les potentats locaux, qui ont passé des contrats douteux avec les firmes étrangères pour l’exploitation des richesses minières de la région, ont assis leur pouvoir sur la corruption et la répression, les populations locales font face à la misère, aux famines et aux maladies.
Une grave sécheresse a décimé les troupeaux et plus rien ne pousse sur les sols privés de la moindre goutte d’eau. Il n’y a plus de mil, de riz ni de lait à donner aux enfants, qui souffrent de malnutrition.
En déclarant la guerre à El Qaida, Nicolas Sarkozy fait mine d’oublier que c’est la misère qui fait le lit de la révolte et qui nourrit les rangs des groupes armés, portés sur les enlèvements et sur tous types de ventes illicites. Cette même misère est la cause de la migration clandestine, qui vient grossir et allumer les banlieues françaises.
Les solutions proposées par Nicolas Sarkozy de déchoir de leur nationalité certains citoyens français issus de l’immigration comme lui, ou de s’attaquer aux populations du Sahel, ne font que mettre le feu aux poudres, et ne résoudront jamais la quadrature du cercle du phénomène de la violence et de la migration clandestine en provenance du Sahel.
Il aurait mieux valu consacrer une partie de l’énergie et des moyens mis en œuvre à aider les pays du Sahel à se développer. En effet, seul le développement économique peut aider ces régions du Sahel à sortir de la spirale de la violence dans laquelle le tourbillon de la misère est en train de les attirer inexorablement.
Bien entendu, peut-on demander à un président de la droite française, plus proche des thèses lepénistes que du devenir de sa propre population des banlieues, de songer à faire le bonheur des gens du Sahel ? C’est presque un non-sens.
Il reste seulement à espérer que ses gesticulations seront sanctionnées par une bonne partie de l’électorat français, et que son discours droitier sera la cause de son naufrage aux élections présidentielles de 2012. Il n’y a qu’à voir sa descente aux enfers dans les sondages pour comprendre qu’il en sera ainsi, sauf si l’opposition socialiste n’arrive pas à surmonter ses divisions et lui laisse le champ libre pour une fois de plus enfourcher le cheval de bataille de la xénophobie raciale et de la préférence pour les stars du Cac 40, par le biais d’un nouveau bouclier fiscal.
La Tribune des Lecteurs, 4/8/2010

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