Quand le saoudien Ibn Talal veut effacer Al Jazeera du monde arab

Il y a quelques semaines, le site spécialisé en audiovisuel maghrébin TVDZ annonçait que le prince saoudien. Al-Walid ben Talal, propriétaire de Kingdom Holding qui contrôle Rotana, prépare le lancement prochain d’une chaîne de télévision régionale d’informations en continu, dont il a confié la direction au journaliste saoudien connu, Jamal Khashoggi, ce dernier a été «remercié» par le principal quotidien saoudien, Al-Watan, pour des propos un peu trop critiques sur le conservatisme religieux dans son pays. (Khashoggi a-t-il un lien de parenté avec le vendeur d’armes saoudien Adnan Khashoggi?). Même si le porte-parole de Kingdom Holding a refusé de donner des détails sur ce projet, il a précisé seulement que la nouvelle chaîne sera cependant indépendante de son groupe régional de divertissement. Les saoudiens ont été les premiers à lancer la liberté d’expression dans les années 70 dans le Monde arabe à travers la presse écrite: Al-sharq al-awsat et Al-Hayat. Ils commencent ensuite à investir dans les médias audiovisuels, et notamment dans les télévisions satellitaires, à la suite de la première Guerre du Golfe (1991). Walid Ibrahim avait lancé la MBC (Middle East Broadcasting Center), la première véritable chaîne panarabe, dès 1991. Puis, vient Saleh Abdullah Kamel avec ART (Arab Radio and Telvision Network) en 1993, suivi par le groupe Mawarid avec Orbit en 1994 (dont la rupture avec la BBC Arabic, en 1996, donnera un sérieux coup de pouce à la naissante Al Jazeera au Qatar). Quant au prince Al-Walid Ibn Talal, le magnat des médias arabes, il ne fait sa véritable apparition dans cet univers qu’en 2003, lorsqu’il rachète, pour quelque 100 millions de dollars, les parts de Saleh Abdullah Kamel dans la LBCI (Lebanese Broadcasting Corporation International), passée au satellite en 1996. Avec une fortune estimée entre 20 et 25 milliards de dollars. Né, en 1955, il est à la fois le petit-fils du roi Abdulaziz ibn Saoud et de Riadh El-Solh, grande figure de l’indépendance libanaise, et il a même quelques liens avec la famille royale marocaine. Al-Walid Ibn Talal a mis en place, au fil des ans, un véritable empire médiatique, via la Kingdom Holding Company. Dans ce dernier domaine, il contrôle les titres les plus importants de la région (Al-Sharq al-awsat et Al-Hayat pour les quotidiens panarabes, Al-Nahar et Al-Diyar au Liban…), mais le fleuron du groupe reste Rotana, créée en 1987, qui regroupe des chaînes télé de divertissement (Music, clip, cinéma, publicité, medias) «pèse» aujourd’hui environ 1,5 milliard de dollars…ce qui manque au prince Ibn Talal c’est l’information. Mais la présence de l’indétrônable Al Jazeera et son emprise politique sur le monde arabe, a fait chuter tous les projets des Saoudiens et en premier lieu le prince Al Walid Ibn Talal. Une chose est sûre, c’est que les Qataris ont, dans un commun accord, promis de ne pas s’attaquer aux dérives du prince Al Walid et du Roi saoudien et cela pour éviter une guerre médiatique panarabe comme l’ont connue l’Algérie et l’Egypte. Même si les Saoudiens utilisent souvent leurs médias écrits pour s’attaquer à Al Jazeera (C’est notamment les journaux saoudiens établis à Londres Al-Sharq al-awsat et Al-Hayat qui avaient déclenché l’affaire des présentatrices démissionnaires d’Al Jazeera, en leur donnant des leçons de…hidjab), mais Waddhah Khanfar le P-DG de la chaîne qatarie, a proposé pour répondre aux pseudo-conservateurs saoudiens, la mise en place d’une «charte vestimentaire», à l’instar de CNN ou de la BBC.
Amira SOLTANE (amirasoltane08@live.fr)
L’Expression, 31/7/2010

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