Les voix de la sagesse

Nombreux sont les fonctionnaires de l’ONU qui se sont succédés dans le dossier du Sahara Occidental. Des envoyés spéciaux, des réprésentants personnels du Secrétaire Général de l’ONU (les chefs de la MINURSO) et d’autres dans des fonctions moins importantes.

Pendant l’exercice de leur fonctions, aucun commentaire, aucune déclaration, ils sont soumis au principe de neutralité et du secret professionnel. C’est une étape pénible, ils sont obligés à se taire sur des choses impardonnables, sur une attitude marocaine caractérisée par le mépris des officiels onusiens, l’arrogance et la provocation en plus des violations continuelles du cessez-le-feu et des droits de l’homme.

Cependant, dès qu’ils sont libérés de cette mission infernale, ils cassent le mur du silence qui leur a été imposé. Les langues se délient et multiplient les déclarations. Certains vont même jusqu’à devenir des défenseurs de la cause sahraouie, comme Franco Bastagli, Chef de la MINURSO entre 2005 et 2007, qui a dénoncé « les résolutions sans fin » et « l’erreur politique » des Nations Unies qui traînent à imposer le respect de sa Charte, tant dans ses points relatifs aux droits de l’homme, à la préservation des ressources naturelles et autres.

Pour M. Bastagli, les Nations Unies ont failli à leur mission pour ne pas avoir su rendre effectives leurs différentes résolutions sur le Sahara occidental, qui toutes mentionnent le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination. Il a dénoncé l’attitude de certains pays comme la France qui « monopolisent l’affaire du Sahara Occidental dans le Conseil de Sécurité » comme c’était le cas lors du vote pour l’élargissement du mandat de la MINURSO en faveur de la surveillance des droits de l’homme ». Par conséquent, ajoute-t-il, « il faut casser ce monopole et écouter les autres voix dans le Conseil de Sécurité ».

Peter Van Walsum, ancien réprésentant spécial du SG de l’ONU pour le Sahara Occidental, malgré son dérapage, a déclaré haut et fort que « la légalité internationale est du côté du Front Polisario » et a qualifié le conflit sahraoui « d’injustice commise contre le peuple sahraoui » et dénoncé « le manque de volonté du Conseil de Sécurité d’imposer l’option d’indépendance au Royaume du Maroc ».

Dans son intervention devant la IV Commission de l’ONU, Frank Rudy, ancien vice-président de la commission d’identification de l’ONU au Sahara Occidental, a souligné que « le Maroc continue d’occuper, coloniser et terroriser le peuple du Sahara Occidental sans craindre de sanctions internationales parce que, franchement, pour le comportement illégal du Maroc, il n’y a pas de sanction internationale ».

« Les Marocains ont pris le contrôle effectif de la MINURSO, choisissant (et éliminant) des électeurs, terrorisant la population locale. Quand ils ont ouvert les yeux, c’est-à-dire quand ils ont vu que le choix des Sahraouis, population autochtone du Sahara Occidental, était le rejet d’un rattachement au Maroc, les Marocains ont décidé qu’il n’y aurait jamais de référendum. Ceci n’est pas seulement mon opinion mais aussi celle de Human Rights Watch, Amnesty international, de tout observateur indépendant et de journaliste ayant commenté cette situation », ajoute-t-il.

Il conclue que « l’énumération des crimes du Maroc, son invasion du Sahara Occidental, son occupation et sa colonisation durant 30 ans, son élimination cynique du référendum mis en place par l’ONU pour résoudre le problème, parlent d’eux-mêmes et condamnent le Maroc. Le Maroc a agi au mépris du droit et tout le monde le sait. La question est de savoir si l’ONU veut ou peut limiter l’illégalité du Maroc. La réponse jusqu’à présent a été clairement non, c’est honteux ».

Julian Harston, Chef de la MINURSO jusqu’au 30 décembre 2009, dans une interview publiée par le journal espagnol El Imparcial, ne mâche pas ses mots. « L’ONU n’a jamais montré une volonté réelle de résoudre le conflit du Sahara Occidental », déclare-t-il. Et il ajoute que « dans le conflit du Sahara Occidental, la pression a été exclusivement exercée sur le Front Polisario. Les négociations n’arrivent jamais à bon port quand la pression est exercée sur l’une des parties et pas sur l’autre ».

Et il conclue que « les résolutions de l’ONU exigent encore l’accord mutuel des parties et une manière de satisfaction pour mettre en application les désirs d’autodétermination des sahraouis. Dans ce contexte, les négociations doivent continuer, malgré le fait que le statut quo favorise Rabat ».

Il y a toutes les chances de résoudre ce conflit qui date de 35 ans si le Conseil de Sécurité écoute la voix de son personnel et en tient compte dans sa prochaine réunion sur le Sahara Occidental.

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