Sous un soleil de plomb, Abidin, 9 ans, enfile son cartable sur le dos et prend le chemin de l’école. Il est 16h. Les portes de son établissement ouvriront dans une demi-heure. Son école se trouve à une dizaine de minutes du «campement 27 février» où il vit avec ses parents dans une maisonnette de 3 chambres, en brique de terre. Comme tous les écoliers des campements du Polisario, Abidin fréquente l’école deux fois par jour. Les cours matinaux débutent à 7h30, avant que la chaleur ne devienne insupportable, et prennent fin vers 12h00. Le cours est entrecoupé d’une pause d’une demi-heure. «Comme ma maison est loin, mes amis et moi trouvons refuge sous un abri moins exposé au soleil, en attendant la reprise des cours», raconte cet enfant au teint mat et au regard vif. Le soir, les enfants quittent les bancs de l’école à 19h. Malgré leur jeune âge, les enfants sahraouis connaissent par cœur les chansons patriotiques, apprises à l’école. Ils sont prêts à les scander à tout moment. Mais il suffit d’un petit tour aux campements, où les graffitis à la gloire de la «patrie» et de la «liberté» sont légion, pour comprendre le degré d’engagement de chacun, tous âges confondus. Le système éducatif dans les campements est inspiré du modèle algérien. Le week-end commence jeudi après-midi et prend fin le vendredi soir. Seule exception, la langue étrangère des écoliers sahraouis est l’espagnol. Une langue qu’ils maîtrisent dès les premières années de l’école. A l’heure des classes, aucun enfant ne déambule dans les campements. Non seulement à cause de la canicule mais parce que l’enseignement est important dans les camps des réfugiés. D’ailleurs, à l’exception de la première génération de Sahraouis, difficile de tomber sur des illettrés. «Nous avons fait de l’éducation notre cheval de bataille», explique Khadija, institutrice. A défaut de collèges et de lycées aux campements, Abidin sera obligé, dans trois ans, de quitter le cocon familial, direction Alger. Il marchera sur les traces de ses deux sœurs aînées dont l’une sera bientôt magistrate, «après des années de dur labeur et de longues nuits sans sommeil», précise Khadija, sa mère. Celle-ci n’a pas fait de longues études. Elle a dû se contenter d’un baccalauréat pour répondre à l’appel du «devoir». «La révolution était à ses débuts et les campements avaient besoin d’instituteurs pour former les nouvelles générations. La mienne a rempli cette tâche», précise-t-elle.
Salma, la quarantaine à peine entamée, est rentrée illico presto aux campements après avoir décroché sa licence en psychologie de l’université d’Alger. Cette mère de deux enfants, passionnée de cuisine marocaine, est très active dans les associations des campements. Sa cadette, une architecte diplômée des universités cubaines, n’a pas dérogé à cette règle. Les étudiants sahraouis ayant fréquenté les universités russes, algériennes, libyennes, cubaines et même syriennes savent que la destination finale n’est autre que… les campements. Ils sont architectes, magistrats, médecins, infirmiers, avocats et même archéologues… Les règlements veulent que la plupart d’entre eux travaillent sans contrepartie salariale. Car, mis à part le budget de fonctionnement alloué à chaque ministère s’élevant à 400 euros par mois, aucun fonctionnaire ne perçoit, en effet, de rémunération.
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