Témoignage d’un jeune sahraoui

Torturé, déshonoré et emprisonné à tort par le régime marocain

Cela, à tout état de faits, ne peut suffire pour combler son altesse, roi d’un royaume colonialiste qui se refuse à toute négociation concrète s’agissant du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui, en dépit de toute pression internationale, en premier lieu, des Nations Unies.
La tragédie du peuple sahraoui pourrait presque s’ajouter aux livres d’histoire traitant des génocides vécus par l’humanité depuis la nuit des temps. On croyait avoir fermé le chapitre des colonisations depuis un demi-siècle déjà. Bien loin de croire en des jours meilleurs, il est évident que l’homme ne peut assoupir son désir d’asservir l’autre, de le dominer, peu importe son identité et les moyens pouvant être utilisés dans cette sale entreprise.
En effet, les souffrances du peuple sahraoui se poursuivent au jour le jour. L’exemple de ce témoignage recueilli dans les camps de réfugiés sahraouis à Tindouf, ne peut que bouleverser l’être humain, le choquer au point de ne pas y croire. Pourtant les faits sont-là et parlent d’eux-mêmes.
Le jeune sahraoui, Mohamed Salem Bouamoud, victime du régime marocain, témoigne de son vécu, des souffrances endurées durant son incarcération et bien avant son jugement. Le jeune est l’une de ces victimes en masse que le régime colonial a arrêté, sans motif consistant, torturé puis mis en prison à tort. Ils sont nombreux d’ailleurs, à vivre cette situation quotidiennement dans les territoires occupés du Sahara Occidental. Leur seul crime : avoir manifesté leur désir d’autodétermination. Ainsi, Mohamed a été arrêté suite à une manifestation organisée à l’Ayoune, dans les territoires occupés. De son témoignage, il raconte que les éléments du makhzen ont pénétré dans sa demeure après avoir forcé la porte. Il a été mis à genoux, menotté, frappé devant l’ensemble de sa famille. Pire encore, il a été forcé d’assister à la scène la plus inhumaine qui puisse être infligée à un être humain. Les policiers marocains, raconte-t-il, « ont violé sa sœur »et l’ont obligé à voir, de son propre vivant, cette situation qui plus est des plus ignobles.
Conduit au commissariat, explique-t-il, les éléments du Makhzen, le torturèrent atrocement. Ligoté, accroché au mur, mis à nu, son honneur a été blessé. Battu à mort, les services marocains l’ont sodomisé pour le pousser à parler. Mais parler pour dire quoi ? Parler de détails dont il ignorait tout ? Désireux de connaître les commanditaires et principaux dirigeants du Polisario sur les territoires occupés ? «Ils m’ont obligé à signer un procès verbal rédigé par eux, où il est fait mention de certains noms que je ne connaissais que de réputation » a-t-il indiqué. La tête baissée, son regard attristé au point d’en verser toutes les larmes de son corps. Des larmes qu’il aurait tellement aimé verser, mais qu’il ne pouvait.
Tous les moyens semblent bons au pouvoir colonial marocain pour faire taire la résistance du peuple sahraoui. Allant des coups de poings, passant par la torture jusqu’au pire des moyens imaginables. Des moyens dignes d’un film hollywoodien.
Lors de son témoignage, Mohamed nous montre la photo de sa sœur violemment frappée. Ce sont-là, les quelques cas, dont l’image a pu franchir le mur du silence vu que le Makhzen, a-t-il indiqué, menace de répression les victimes ainsi que leur familles si ces images sont diffusées sur Internet.
Il figure parmi l’une de ces nombreuses victimes des arrestations politiques perpétrées au quotidien par le Maroc au su et au vu de tous. Les séquelles physiques disparaîtront, le temps les guérira certes, mais qu’en sera-t-il de ces autres séquelles non physiques que pas même la magie d’antan ne pourrait guérir?
Mohamed Salem Bouamoud raconte
Témoignage d’un revenant du «Cimetière de vivants »
Ce témoignage repris intégralement par El Djazair.com révèle l’atrocité du drame infligé par le Makhzan aux sahraouis osant défendre et revendiquer leur droit à la liberté et à l’autodétermination.
Mohamed Salem Bouamoud, persécuté à plusieurs reprises et n’ayant pas pu se soigner dans les territoires occupés. Il est donc venu aux camps de réfugiés pour se faire soigner :
« Je suis venu des territoires occupés en passant par la Mauritanie, fuyant la répression marocaine, et pour me soigner des séquelles de la torture et du traitement que j’ai subi durant les différentes phases de ma détention. J’ai donc fuis parce qu’il n’y a pas de possibilité de se soigner et en plus j’avais peur qu’il m’injecte une quelconque maladie, le sida ou autres. Cette pratique courante à laquelle s’apprêtent les services marocains du coté des territoires occupés, est infligée aux jeunes participant aux différentes manifestations organisées.
J’ai été arrêté le 21 mai 2005, lors d’une manifestation qui a eu lieu juste au début de l’Intifada pour l’indépendance, ayant pour objectif de demander le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination. Cette Intifada s’est poursuivie et il y a eu de nombreuses arrestations, dont celles d’Aminetou Haida, Ennaâma Asfari et bien d’autres encore.
Nous avons déclenché l’Intifada en 2005 qui se poursuit encore, en dépit de la forte présence militaire et sécuritaire dans les territoires occupés qui dépasse de loin celle dans les villes marocaines, vu qu’il y a un appareil répressif spécial pour le peuple sahraoui.
Au cours de la première détention, ils ont enfoncé la porte, tabassé ma famille et humilié ma mère et mes sœurs à mort. Ma sœur est restée 15 jours sans pouvoir parler des suites de cette agression.
Ils m’ont pris de la maison. Les yeux bandés et menottés par la Police Judiciaire marocaine, j’étais conduit à un centre où il y avait beaucoup de gens dont j’entendais les cris. Par la suite, ils m’ont déshabillé complètement.
Je vous raconte des faits impossibles à exprimer. C’est tellement difficile pour moi. Il n’y a ni organisation, ni presse, ni autres organismes pouvant relater ce que nous avons pu vivre dans le silence total.
« C’est une cause noble que nous défendons et ces tortures ne m’arrêteront pas »
Ce que j’ai vécu était horrible. On me mettait un plastique sur la tête jusqu’à m’asphyxier et quand ils sentaient que je ne respirais plus, ils lâchaient un peu du leste. C’était une souffrance intolérable. Au même temps, on m’a ligoté les mains et les pieds, me mettant une barre entre les pieds et me suspendant en haut, à tel point que les douleurs au niveau de mon dos devenaient insupportables. Ils utilisaient le bâton pour me pénétrer. Cette pratique est utilisée aussi bien pour nous les hommes que pour les femmes détenues. Elle sont d’ailleurs nombreuses à vivre cette situation.
Ils m’ont interrogé des nuits durant pour savoir qui a organisé ces manifestations et qui nous soutenait, nous fournissait les drapeaux. Je répondais que c’était par notre propre conviction et que les drapeaux, nous les avons confectionnés nous-mêmes. A ce moment-là, ils se so
nt mis à me torturer pour que j’apprenne l’hymne national marocain et pour que je ne cite plus le Polisario, chose que je ne pouvais pas concevoir en dépit de toutes les tortures infligées.
Nous avons passé trois jours de torture continue sans rien manger ni boire. ils n’ont pas cessé de nous insulter et de nous tabasser à coups de poing à la figure. Au terme de quelques jours, assis à une table, ils ont eux-mêmes préparé un procès verbal qu’ils nous obligeaient à réciter reconnaissant que Ahmed Hamada, le défenseur des droits de l’homme et Aminetou Haidar, nous donnaient les drapeaux et l’essence pour les manifestations. Des personnes que je connaissais uniquement de nom et que je n’ai jamais rencontrées.
Le dernier jour, nous avions été présentés au juge d’instruction dans une salle où il n’y avait ni avocats ni autres personnes pouvant nous défendre, c’était un Lundi. Les avocats venus, ils ont demandé le report de l’audience pour le jeudi qui suivait. Nous étions face au juge alors que nous ne savions rien du contenu du procès fabriqué en toutes pièces mais que nous avons signé forcés. Ils nous ont reconduits à la prison Noir que j’appellerai « Le cimetière des vivants ».
Nous étions dans une toute petite pièce qui contenait 120 prisonniers. Vu le manque de places, on dormait dans les toilettes, une misère atroce. Une fois le jeudi arrivé, le jour du jugement, la cour nous a condamné à 15 ans de prison ferme, pour un crime que nous n’avions pas commis. 20 ans de réclusion était la peine la plus minime. Après avoir été reconduits dans la prison Noir, notre situation empirait et devenait de plus en plus grave. C’est ce qui nous a amené à organiser plusieurs grèves de la faim dont la plus longue était de 52 jours. Vu les conditions d’hygiène désastreuses dont lesquelles nous avions entamé nos grèves de faim, notre état physique se dégradait d’une manière accélérée.
Des suites des grèves de la faim et vu notre situation qui empirait de jour en jour, nous avions introduit des recours auprès de la cour qui a réduit notre peine à trois années de prisons. C’est grâce à la pression de nombreuses organisations internationales que nous avions pu arracher cette réduction de peine, notamment avec le soutien et l’action de l’association marocaine des droits de l’homme et d’autres organisations.
Aujourd’hui, je suis sorti en gardant des séquelles et je tiens à remercier le gouvernement du RASD et aussi le gouvernement algérien pour son soutien inconditionnel et son aide. Esspérons que nous pourrons lui rendre ne serait-ce que le peu, de ce qu’il a donné au peuple sahraoui.



Source : Eldjazair.com

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