Le Maroc envisage d’interrompre sa collaboration en terrorisme et immigration

COMME REPRÉSAILLES PAR L’ATTITUDE DE L’ESPAGNE DANS LE « CAS HAIDAR »
Le Maroc envisage d’interrompre sa collaboration en terrorisme et immigration
Le ministre marocain des Affaires Etrangères, Tayeb Fassi Fihri, a menacé l’Espagne d’entamer des représailles dans la coopération sur immigration, terrorisme et trafic de stupéfiants et a exposé que « le moment de tracer nos relations est peut-être arrivé « . De plus, le Maroc a accusé l’Espagne et l’Algérie d’être derrière un « complot anti-marocain ». Quant à lui, le Ministère espagnol des AE a informé qu’il poursuit les contacts avec le Maroc, l’Algérie et l’ONU pour trouver une solution au « Cas Haidar ».

Agences/ Pedro Canales, 07-12-2009

Les déclarations faites par le ministre marocain des AE, Tayeb Fassi Fihri, à Bruxelles, en menaçant soigneusement l’Espagne de représailles en  immigration, trafic de stupéfiants et terrorisme, ont été accueillis avec enthousiasme par la classe politique dans le Royaume alaouite qui s’est lancé dans une croisade sans précédents pour justifier l’annexion du Sahara Occidental. De plus, Haidar a accusé l’activiste sahraouie Aminatou d’être la cause de sa situation et de ne pas être une défenseure des Droits de l’homme, mais un membre du Front Polisario.
Ce mardi, tous les journaux marocains estamperont à la une l’épée de Damocles brandi par Fassi Fihri : « Avec quel Maroc veut-elle construire son futur, l’Espagne ? Avec celui qu’elle coopère en matière d’immigration, de drogues et de terrorisme, ou avec qui ne veut ni de Maghreb ni de l’Europe ? ». « Peut-être il est arrivé, le moment de tracer nos relations » le chef de la diplomatie alaouite a suggéré, dans un message clair de chantage politique au gouvernement de Rodríguez Zapatero. Cependant, le ministre marocain n’a pas été capable d’expliquer comment il est possible qu’une citoyenne marocaine que, selon Rabat, a commis un délit de lèse-majesté, au lieu de la juger dans les tribunaux, on se débarrasse d’elle en l’expulsant vers un autre pays. Un peu inédit dans la jurisprudence internationale.
Fassi Fihri a rappelé que le Maroc n’est « jamais arrivé à un accord avec l’Espagne vendredi passé pour que Haidar revienne à El Aaiún et s’est demandé « jusqu’où on arrivera dans l’infestation des relations hispano-marocaines ». « Depuis des années on construit patiemment cette relation dans le sens de l’intérêt réciproque et nous avons beaucoup fait. C’est à cette Espagne à laquelle je m’adressee « , a ajouté le ministre dans des déclarations à la presse à Bruxelles.
Ainsi, il a commenté que l’Espagne et le Maroc ont fait « beaucoup » pour construire l’avenir et que « lorsqu’il y a immigration c’est avec nous avec qu’il parle et à personne d’autre » ou « quand il y a des problèmes d’insécurité ou de perspectives d’investissement ».
De la même manière, il a reproché à Haidar d’utiliser le passeport marocain « comme un chiffon ». « Un passeport au Maroc a un symbole et on ne peut pas l’user comme un chiffon, comme quelque chose pour accéder à un territoire avec un plan politique », a-t-il dit après avoir répété qu’Aminatou Haidar « reçoit des instructions de ses partenaires » et que ce sont eux « les responsables de la région, de la stabilité de la région et de la solution du conflit sahraoui ».
Il a aussi réitéré que Rabat n’a jamais donné son accord à l’Espagne pour permettre le retour de Haidar à El Aaiún et que lui-même a reçu l’Ambassadeur de l’Espagne à Rabat pour lui dire que « la position du Maroc n’avait pas changé ». « On ne peut pas recevoir quelqu’un qui dit qu’il veut entrer sans reconnaître la nationalité et sans utiliser le passeport marocain », conlut-t-il.
Ce qui a attiré le plus d’attention des observateurs politiques marocains c’est que Fassi Fihri a fait ces déclarations à Bruxelles, après que Benita Ferrero Waldner s’est réuni avec le Commissariat Européen des relations extérieures en présence des représentants de la Suède (qui assume actuellement la présidence), de l’Espagne (qui l’assumera en janvier 2010) et d’autres membres de la Commission. La presse marocaine ne dira pas de mot de la position espagnole dans cette réunion.
Aux déclarations gouvernementales marocaines, les partis politiques parlementaires prêtent un choeur que tous font écho de la croisade nationale déchaînée par le Palais royal. Des nationalistes de l’Istiqlal, des socialistes de l’USFP, des communistes du PPS ou du FFD, constitutionnalistes et populaires, tous les représentants de la classe politique marocaine appuient sans fissure la position offic
ielle, et condamnent un « complot anti-marocain », selon eux fomenté par le Polisario, par son mentor l’Algérie et avalisé par l’opinion publique espagnole « mal informée ».
Certains, comme le président du Conseil Consultatif pour le Sahara, un organisme créé par le Palais alaouite, Khalihenna Ould Rachid, vont même jusqu’à soutenir que « la position officielle espagnole est celle du soutient au plan d’autonomie », en laissant par le moins dans une mauvaise position le ministre Moratinos et le président Rodríguez Zapatero. Dans la même ligne abonde le président d’un « Groupe dénommé d’amitié du sénat espagnol et (son équivalent) la Chambre marocaine de conseillers », Yahya Yahya qui parle aussi d’un complot anti-marocain « destiné à abîmer les relations entre le Maroc et l’Espagne ». Peu ou rien ne se connaît de l’interlocuteur espagnol dans ce « Groupe d’amitié ».
Mais le plus surprenant a été la déclaration de Fouad Ali El Himma, ancien condisciple de Mohamed VI dans le collège royal, en affirmant que « l’Espagne est consciente que ce que le Maroc a fait en relation avec Aminatou Haidar est une application simple de la Loi et est conforme au droit international ». Évidemment, El Himma s’est bien épargné de nommer le représentant officiel espagnol auteur de déclarations semblables, qui ne peut pas être autre qu’un des interlocuteurs du Président de la Chambre marocaine de conseillers, Mohamed Biadillah, secrétaire général du même parti qu’El Himma, qui a visité Madrid la semaine passée. El Himma a envoyé le même message que le ministre des affaires étrangères, en rappelant que le Maroc est son interlocuteur privilégié quand elle veut parler d’immigration clandestine, de drogues, d’extrémisme et de terrorisme.
Dans ce climat de patriotisme euphorique ce n’est pas étonnant que même le premier secrétaire de l’Union Socialiste, Abdelwahad Radi, pour justifier l’attitude du Maroc vers Aminatou Haidar, ait déclaré que « la proposition d’autonomie dans le Sahara, est un plan démocratique destiné à résoudre certainement cette question ».
Le MAE poursuit les contacts avec l’ONU et le Maroc, et parle avec l’Algérie
Pour sa part, elle le Ministère des Affaires étrangères et la Coopération a assuré lundi qu’il continue « à travailler intensément » pour trouver une solution « acceptable » à la situation de l’activiste sahraouie Aminatou Haidar et qu’il a maintenu des contacts avec l’ONU et le Gouvernement marocain. De plus, il a informé ce que le ministre Miguel Angel Moratinos a parlé à son homologue de l’Algérie et a nié que le cas de Haidar ait engendré des tensions avec ce pays.
Dans un communiqué, le MAE a remarqué que Moratinos a parlé à nouveau par téléphone avec son homologue marocain, Taieb Fassi Fihri et a profité pour « une série de contacts diplomatiques à Bruxelles avec la partie marocaine pour déplacer la préoccupation du Gouvernement espagnol ».
Le chef de la diplomatie marocaine s’est présenté ce lundi matin à Bruxelles pour une réunion du Conseil d’Association UE – Maroc, mais Moratinos n’y a pas participé mais il a directement voyagé à midi pour assister au Conseil des Affaires Générales de l’UE qui s’est réuni l’après-midi.
Selon les AE, Moratinos a parlé, en plus, plusieurs fois par téléphone avec son homologue algérien, Mourad Medelci, et a exprimé sa satisfaction par « le point de vue constructif et la collaboration des autorités de l’Algérie ». Ainsi, le Gouvernement a souligné les « relations bilatérales excellentes » avec ce pays dans tous les domaines et a expliqué qu’aucune tension n’a surgi avec Alger à cause de la situation de Haidar.
Quant à lui, le secrétaire d’État des Affaires Etrangères, Angel Lossada, s’est réuni ce midi avec des représentants du Front Polisario pour informer des démarches du Gouvernement espagnol. Selon les AE, cette rencontre a été « très cordiale » et les deux parties y ont déclaré leur intention de « collaborer étroitement dans la recherche d’une solution à la situation d’Aminatou Haidar ».
D’un autre côté, la Mission Permanente espagnole devant les Nations Unies a sollicité la collaboration tant du Secrétaire Général des Nations Unies, de Ban Ki-Moon, comme du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Droits de l’homme, Navanethem Pillay. L’ambassadeur devant l’ONU est de plus en « contact permanent » avec l’envoyé spécial des Nations Unies pour le Sahara Occidental, Christopher Ross.

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