Le mur de la méfiance

Sans doute, personne n’a oublié le célèbre mur qui divisait la ville de Berlin en deux. Tous les jours ou presque, on parlait de lui dans la presse écrite, les TV, les radios et dans chaque coin de rue. Les citoyens européens avaient entendu tellement de commentaires à son sujet qu’ils avaient l’impression de le connaître personnellement. Il faisait la une parce qu’il était un symbole de la guerre froide ou plutôt de la guerre de propagande livrée par l’Occident contre l’Union Soviétique.
D’autres ont vu le jour après la chute du mur de Berlin, mais les pays dits « démocratiques » n’y prêtent guère attention. Ces nouveaux murs n’ont pas le même « privilège » accordé à celui construit par les russes, parce qu’ils n’ont pas été construits par des communistes, mais par des musulmans qui se disent conduits par un Commandeur des Croyants monté sur un cheval déguisé en pingouin blanc.
A cause du black-out médiatique, vous n’allez, sans doute, pas deviner de quel mur  nous parlons ici. Pourtant, ce mur est là depuis plus de 23 ans et il a été érigé pour perpétuer l’occupation d’un territoire que, jusqu’à présent, est considéré par les Nations Unies comme un territoire non-autonome.
Ce mur, long de 2500 kilomètres et qui divise le Sahara occidental et son peuple en deux parties isolées l’une par rapport à l’autre, a été érigé dans la criminelle intention de conférer à l’occupation illégale du Sahara Occidental par le Royaume du Maroc un caractère irréversible et d’enlever aux milliers des familles sahraouies chassées de leurs foyers et forcées à l’exil hors de leur pays, l’espoir de retrouver un jour, dans la paix et la liberté, les leurs après des décennies de séparation
Ce mur, truffés de fils de barbelés et d’une variété de mines, y compris les mines anti-personnelles dont l’usage est prohibé par la communauté internationale, et constamment gardé par plus de 150.000 de soldats, se révèle pourtant 60 fois plus long que le mur de Berlin. Pourquoi certains murs font si souvent parler d’eux alors que d’autres sont entourés d’un grand silence ? Serait-ce à cause des murs de silence que les grands médias érigent chaque jour ?
Les camps des réfugiés sahraouis dans le sud de l’Algérie se trouvent dans le plus aride des déserts. Là-bas, tout n’est qu’un vide immense dans lequel seuls des rochers semblent pousser. Et pourtant, c’est à ces endroits et dans les quelques territoires libérés que les Sahraouis ont réussi à construire l’une des sociétés les plus ouvertes et les moins machistes de tout le monde musulman.
Les Sahraouis attendent. Ils semblent condamnés à l’angoisse et à la nostalgie. Les camps de réfugiés portent les noms de leurs villes occupées, de leurs liens de rencontres disparus, de leurs familles dispersées : Laayoune, Smara, Dakhla. On les appelle les enfants des nuages parce qu’ils ont toujours poursuivi la pluie. Mais depuis plus de 34 ans, ils sont aussi en quête de justice. Dans notre monde, c’est une denrée qui se révèle bien plus rare que l’eau dans le désert.
Leur malédiction? Avoir un territoire riche, entre autres, en phosphates, en poissons et en pétrole.
Il y a un verset dans le Coran qui dit que si les rois rentrent dans un village, il sera dévasté et ses habitants humiliés. Il devrait aussi y avoir un autre verset qui dise « Les ressources naturelles feront le malheur de ton peuple ».  Une prophétie qui se réaliserait aujourd’hui dans ce coin du monde.
Entouré par ce mur construit par le roi du Maroc, 34 ans après son exode, le peuple sahraoui attend toujours le jour où il pourra se prononcer librement sur son avenir. Pire encore, la communauté internationale se tait devant les violations des droits humains à l’encontre des sahraouis qui affrontent quotidiennement les affres de la colonisation marocaine.
En plus des multiples dangers que représente ce mur, qui est après tout, un intolérable défi pour une communauté internationale qui a toujours estimé que le Sahara Occidental est un territoire à décoloniser, sa démolition est, désormais, une mesure urgente susceptible de contribuer à créer, a la veille des pourparlers prochains, des conditions de confiance réciproques entre les deux parties prenantes au conflit, le Royaume du Maroc et le Front Polisario. 

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