Brice Hortefeux, ministre français du Travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, vient d’être condécoré par le ouissam (médaille) alaouite de Grand Officier. Il faut reconnaître qu’il l’a bien méritée pour tous les services rendus au Maroc.
Son engagement à défendre les intérêts du royaume alaouite est tel qu’il n’a pas hésité, en décembre 2005 à envoyer des missives aux maires du Mans, Jean-claude Boulard, et de Gonfreville l’Orcher, Jean-Paul Lecoq, pour leur demander de retirer le drapeau de la RASD de leur cérémonies de solidarité avec le peuple sahraoui.
Il y a plus d’une quinzaine d’années, ces deux collectivités ont enfreint les bonnes mœurs diplomatiques en se jumelant avec les campements de réfugiés sahraouis de Tindouf en Algérie. Shocking ! En effet, la glorieuse diplomatie soutient depuis toujours le Maroc dans le dossier du Sahara occidental. Mais force est de reconnaître que jusque-là personne, à part les réseaux consulaires marocains, n’a rien à trouvé à redire sur ces jumelages. Et Hortefeux fût… qui écrit aux maires : « l’attention du Ministère de l’Intérieur a été attirée par l’Ambassade du Maroc en France sur le fait que votre Mairie arborait à certaines occasions un drapeau de la « République Arabe Sahraouie Démocratique » et consacrait dans son site Internet un article comportant des formulations susceptibles d’être contestées au plan diplomatique ».
Ne reculant devant rien, Hortefeux se présente comme agissant sur « la recommandation du Ministère des Affaires Etrangères ». Et enchaîne : « tout en respectant profondément l’action humanitaire et sociale de votre municipalité en faveur des camps sahraouis, j’estime souhaitable au regard de nos engagements diplomatiques de vous recommander d’éviter, dans vos manifestations officielles et votre communication publique (…) la présence du drapeau sahraoui ainsi que l’utilisation de termes susceptibles de traduire une prise de position diplomatique, tels que « République Arabe Sahraouie Démocratique », au profit d’expressions plus neutres (« Sahara occidental ») ne prêtant pas à contestation. ».
Pour justifier sa démarche, B. Hortefeux, rappelle que « le territoire du Sahara occidental n’est pas encore doté d’un statut juridique déterminé » et que la « “République Arabe Sahraouie Démocratique” n’est pas reconnue par l’ONU, pas plus que par notre pays, et ne constitue actuellement qu’une “entité” sans existence légale. La présence de son drapeau à côté de ceux de pays membres des Nations-Unies devrait, donc, au regard de notre diplomatie, être évitée. »
En matière de jumelage, la réglementation indique seulement que ceux-ci ne doivent pas porter atteinte à la diplomatie française. Rien n’interdit en revanche, à une ville française de se jumeler avec une entité dont le statut est de territoire non-autonome au sens que l’ONU entend, c’est à dire un territoire soumis à un colonialisme et DOIT s’autodéterminer, selon les règles internationales en la matière. C’est d’ailleurs pour cela que beaucoup de collectivités françaises sont jumelées avec des camps de réfugiés de partout dans le monde.
La démarche de Brice Hortefeux est révélatrice du degré de corruption qu’ont atteint certains responsables et hommes politiques français qui ne défendent pas gratuitement ni par principe les thèses marocaines qui représentent, en ce qui concerne le Sahara Occidental, le comble de l’injustice.
« La RASD n’est pas reconnu par l’ONU ». Cela est un argument biaisé qui ne cherche pas la manifestation de la vérité car même si la RASD n’a pas de siège officiel à l’ONU, Hortefeux faisait semblant d’ignorer qu’elle est admise, reconnue et respectée au sein d’une importante entité régionale qu’elle a cofondée et qui est l’Union Africaine. Elle est également reconnue par de nombreux pays en dehors de l’Afrique. Actuellement plus de 85 pas la reconnaissent dans le monde. Et ce n’est pas rien. Par ailleurs, le Front POLISARIO est membre observateur comme le Fatah palestinien à l’ONU et à ce titre il a pu négocier et conclure des accords avec l’ONU mais aussi avec le Royaume du Maroc, les derniers en date étant les accords de Huston, quatre rounds de négociations à Manahasset et une rencontre informelle à Vienne au mois d’août dernier.
Les villes françaises jumelées avec leurs consoeurs sahraouies ont eu une démarche non seulement juridiquement légale mais aussi moralement juste. Par contre la démarche du « Grand Officier » marocain ressemble plus à une honteuse intimidation qui se soucie peu du droit et de l’éthique et qui méconnaît totalement l’engagement sincère et profond des villes comme Gonfreville l’Orcher ou le Mans à côté du Sahara Occidental dans le drame de l’occupation qu’elle traverse.
La RASD est un peuple et un Etat qui sont déjà souverains depuis plus de trois décennies sur une partie non négligeable du Sahara Occidental, aussi grande que la Belgique, ils administrent Tifariti, Bir Lehlou, Mijek… et y appliquent les lois de la RASD. Ils ont des échanges économiques, culturels et humains continues et de tous les jours avec beaucoup de pays du monde. Ils ont des institutions et une histoire qui ne font pas honte aux sahraouis.
Ceux qui ont changé de veste et qui n’ont pas hésité à s’adresser directement au peuple sahraoui pour le conseiller et lui dire combien il est dans son intérêt actuel et futur de se considérer comme marocain… Qu’elle ignorance pour la lutte des peuples ! Quel mépris pour le peuple sahraoui et quelle injustice vis-à-vis du Sahara Occidental ! Comme si c’est un luxe et un jeu pour les sahraouis de résister, de lutter et de souffrir le martyr des décennies durant. Il faut savoir que le sang, les larmes et les sacrifices des sahraouis n’était pas sans raisons, et il est temps de leur rendre justice.
Il faudra bien tot ou tard reconnaitre qu’il y a un peuple qui ne demande que de prendre en main ses destinées et que tôt ou tard il faudra lui donner ce droit qui est internationalement reconnu et approuvé par les instances internationales.
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