Lancien chef de lopération de lONU au Sahara Occidental pense que lONU doit faire valoir les droits à un référendum plus rigoureusement. « Mais certains membres permanents du Conseil de Sécurité ne veulent pas pousser les choses trop loin », dit Kurt Mosgaard, lancien chef de MINURSO, les forces de lONU au Sahara Occidental, dans une interview avec une organisation norvégienne.
Linterview est un extrait de la brochure que vient de publier l’ONG Conseil Norvégien de Réfugiés.
Aussi longtemps que le Maroc soppose au référendum, le processus de lONU reste dans limpasse. Même sept ans avec James Baker comme envoyé spécial de lONU n’ont pas suffi pour avoir une solution qui respecte les droits des Sahraouis. Le Maroc refuse daccepter les accords conclus concernant lorganisation dun référendum sur lindépendance pour le Sahara Occidental. Ainsi on est de retour au point de départ. Un processus mené par lONU qui dure depuis 17 ans na pas abouti à une percée politique.
Kurt Mosgaard, lancien chef des forces onusiennes au Sahara Occidental, MINURSO, pense que lONU doit réagir. Il dit que lONU doit être plus précise dans ses demandes, et quil est vraiment temps que le référendum d’autodétermination pour le Sahara Occidental ait lieu. Ainsi il critique le rejet du Maroc à un tel référendum.
« lONU doit dire que le référendum sur le Sahara Occidental doit contenir la possibilité de lindépendance. Il va de soi que le vote inclut cette alternative. Il suffit davoir des connaissances générales pour comprendre cela », dit Mosgaard dans linterview avec le Conseil Norvégien des Réfugiés.
Une politique réaliste.
Le général de division danois était chef des forces militaires de la MINURSO de 2005 à 2007. Il tient actuellement un haut poste dans la défense danoise, et il a des opinions claires sur le processus échoué de lONU. Il pense que la mentalité de commerçant et la politique réaliste classique sont des raisons importantes du fait quon nest jamais arrivé à trouver une solution au problème du Sahara Occidental.
« Quelques-uns des membres permanents de Conseil de Sécurité ont une relation avec une des parties, ce qui fait que lon ne veut pas pousser les choses trop loin. Je suis un très grand partisan de lONU, mais je pense aussi que lONU a quelques faiblesses. LONU doit avoir ses principes, et on ne doit pas toujours choisir la solution la plus facile », déclare Mosgaard.
Mosgaard a montré quil est à même dagir. Quand il était chef de MINURSO, il a donné lordre de baisser le drapeau marocain du bâtiment de lONU dans la capitale du Sahara Occidental, El Aaiun, pour de bon. Le drapeau avait été une source dirritation pour beaucoup de Sahraouis et demployés de lONU, mais aucun de ses prédécesseurs navait osé le baisser. Cette action, petite mais très symbolique, allait le rendre très peu populaire dans les milieux marocains.
« Laffaire est simple. LONU a clairement exprimé que le statut du Sahara Occidental est non résolu. Alors, on ne peut pas accepter la présence du drapeau marocain au bâtiment de lONU. Cest contraire à notre mandat. Je ne sais pas comment cela a pu durer pendant 16 ans sans que personne ne réagisse », dit-il.
Il dit que laffaire du drapeau est lune des preuves que lONU dit une chose à New York mais joue, dans la réalité, un autre rôle.
On doit dire non
Après 17 ans de dialogue entre les parties, avec une population de réfugiés frustrée et isolée dans le désert de lAlgérie et avec 45 millions de dollars de dépenses annuelles pour les services de la MINURSO, le général de service pense que lONU a passé trop de temps à trouver une solution. Le problème principal, maintient-il, provient du fait quon a choisi de sen tenir au chapitre VI du pacte de lONU où il sagit dune solution pacifique que les deux parties puissent accepter.
« Il est temps que lONU dise non et sexprime plus clairement. Si lONU ne veut pas séloigner du chapitre VI, on aura de nouveau 30 ans de statu quo qui passeront très vite », dit Mosgaard.
Quand le Conseil de Sécurité avance dun pas et utilise le chapitre VII du pacte, il demande aux pays membres de lONU des mesures de force pour établir la paix. Cela se fait quand il voit quune solution du conflit pacifique ne réussit pas et que la situation est une menace à la paix et la sécurité internationales. Quand lIrak a occupé le Kuweit en 1990 et lONU a décidé de défendre le pays militairement, le Conseil de Sécurité a utilisé le chapitre VII. Après 1990, plus de cent résolutions ont été votées daprès le chapitre VII. Mais le Conseil de Sécurité na pas été prêt à faire la même chose quand il sagit de loccupation marocaine du Sahara depuis 1975.
« United Nothing »
Les forces de MINURSO sont principalement chargées de surveiller le cessez-le-feu. Mosgaard dit que, malgré tout, les deux parties collaborent bien quant à cette partie de laccord.
« Néanmoins quelques-uns vont peut-être dire que le cessez-le-feu nest quun ajournement du problème comme il nétait que temporaire dans lattente dune solution politique. »
De plus, la MINURSO na pas le mandat dintervenir ou de signaler des violations des droits de lhomme au Sahara Occidental. Depuis des années, les organisations Human Rights Watch et Amnesty International demandent que la MINURSO ait le droit et le devoir de protéger la population civile contre de tels abus. Le Ministre des Affaires Étrangères norvégien, Jonas Gahr Støre, a aussi demandé que le mandat de la MINURSO soit élargi. Le Haut Commissaire de lONU pour les Droits de lHomme (UNCHR) a donné suite à cette demande dans son rapport au Conseil de Sécurité en septembre 2006, et a signalé le besoin dune surveillance et une protection continues de la situation des droits de lhomme. Plus tard, cette recommandation a été soutenue par les Secrétaires Généraux de lONU, Kofi Annan, et Ban KI-Moon, dans leurs rapports, et plusieurs membres du Conseil de Sécurité ont essayé de linclure dans leurs résolutions. Néanmoins, cette recommandation na jamais obtenu le soutien du Conseil de Sécurité à cause du refus de la France. Ainsi , lopération reste « un témoin silencieux des violences graves des droits de lhomme », daprès Amnesty.
Malgré le cessez-le-feu, les Sahraouis pensent que lONU a manqué à sa charge. Pour beaucoup, il nétait pas du tout acceptable de déposer les armes en 1991 en échange dun référendum. Maintenant, ils voient que la stratégie du Polisario peut avoir échoué et que lONU nest pas à même dimposer une solution. Les critiques des Sahraouis sont vives . « UN veut dire United Nothing », dit-on dans les camps des réfugiés en Algérie.
Quoiquil en soit, Mosgaard est sûr quune guerre ne sera pas la solution, et que ni le Polisario, ni le Maroc ne peuvent gagner sur le champ de bataille.
« Par contre, une nouvelle guerre pourra créer du désordre dans toute lAfrique du Nord-ouest. Elle coûtera beaucoup de vies humaines des deux côtés, et il y aura de nouveaux flots de réfugiés. Le Maroc sera sérieusement touché, et il y aura toujours un risque que les états voisins soient mêlés au conflit. Chaque jour sans guerre est un bon jour », dit Mosgaard.
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